Jésus dans le Coran

Jésus tient une toute petite place dans le Coran : 59 versets, qu’il partage avec sa mère, sur un total de 6236.
Sa présence ne doit pas nous étonner vu que les premiers califes omeyyades étaient chrétiens. 59 versets, c’est peu, mais en comparaison, Mahomet n’est jamais cité. Lorsqu’ils lisent ou récitent le Coran, les musulmans comprennent que les références à « mon serviteur » ou à « tu » ou même à « il » hors contexte s’adressent à Mahomet. Parfois, le nom de Mahomet a été ajouté, ainsi dans le verset 2 de la sourate 68 : « Tu (Mahomet) n’es pas, par la grâce de ton seigneur, un possédé. » La tradition considère le début de cette sourate comme la première révélation faite à Mahomet.

Dans le Coran, Jésus est nommé Issa (Isa). Ce qui est curieux, puisqu’en arabe, Jésus se dit Yasou. Issa viendrait d’Ésaü, un personnage biblique, petit-fils d’Abraham, frère de Jacob qui est aussi appelé Israël. Jésus serait donc le frère d’Israël. Pure conjecture.

Le Jésus du Coran n’est pas le Jésus des évangiles et cela non plus ne doit pas nous étonner : les arabes chrétiens de Syrie ne reconnaissaient pas le dogme des Byzantins, ils étaient hérétiques. Dans le Coran, Jésus est un être exceptionnel certes, mais pas Dieu, ni le fils de Dieu, au mieux un prophète (Co. 5, 72).

Les 59 versets qui concernent aussi bien Jésus que Marie, seule femme citée dans le Coran, sont éparpillés dans 8 sourates, 8 chapitres différents. Mis bout à bout comme dans les Grands Thèmes du Coran de Jean-Luc Monneret, ils ne racontent pas une histoire, ce sont des tranches de vie.

Voyons cela en détail.

Jésus est né hors mariage, d’une jeune fille nommée Marie, qui est accusée d’avoir commis une action monstrueuse (Co. 19, 27). Dès sa naissance, Jésus parle (Co. 19, 28-34). Il se bénit lui-même : «Que la paix soit avec moi au jour de ma naissance, au jour de ma mort et au jour où je serai ressuscité vivant».

Jésus fait des miracles, cette fois, avec la bénédiction d’Allah. Il guérit les aveugles, les lépreux et ressuscite les morts… «Tout ceci n’est que pure magie» tempère le Coran (Co. 5, 110).

Le Coran reprend un événement raconté dans un apocryphe chrétien : L’Évangile de l’enfance selon Thomas. Jésus fabrique des oiseaux en argile puis, en soufflant, leur donne vie. Les mots utilisés sont les mêmes que ceux employés lorsqu’Allah donne vie à Adam. Jésus a donc le même pouvoir que Dieu ? Dans l’Évangile de l’enfance, Jésus fait s’envoler les oiseaux car les Juifs lui reprochent d’avoir créer ces jouets un jour de sabbat ; il fait donc disparaître l’objet du délit.

Jésus annonce la venue d’un messager de Dieu (Co. 61, 6), ce sera Ahmad (pas Mahomet).

Il prend des apôtres, ses auxiliaires face à l’incrédulité des Juifs (Co. 3, 52). Certains Juifs le suivent, d’autres nient (Co. 61, 14). Mais Jésus n’est qu’un prophète (Co. 5, plusieurs versets). Jésus affirme : «Ô enfants d’Israël adorez Dieu qui est mon seigneur et le vôtre.» (Co. 5, 72).

Il est qualifié de Messie (Co. 4, 157) ! Faut-il y voir une erreur d’interprétation ? Jésus-Christ, qui était devenu le nom commun de Jésus au cours des siècles, a t-il été traduit par « le Messie Issa » … ce qui est un non-sens pour les musulmans ?

Les Juifs ourdissent un complot contre Jésus (Co. 3, 54) mais il n’a pas été mis à mort, un autre a pris sa place (Co. 4, 157). Il a été rappelé à Dieu (Co. 5, 55). Le verset 3, 59 montre l’importance de Jésus : « Aux yeux d’Allah, Jésus est comme Adam : il le forma de terre et dit : Sois et il fut.»

Pourquoi Jésus est-il monté vivant vers Dieu ? Car il doit revenir à la fin des temps : «En vérité, le retour de Jésus sera le signal de l’arrivée de l’Heure. » (Co 43, 61)

Pour les musulmans sunnites, c’est donc Jésus qui jugera les hommes au jour de la résurrection (Co. 4, 159) et pas Mahomet. Jésus est un être exceptionnel d’après le Coran, Mahomet n’est qu’un homme. Un des minarets de la Mosquée des Omeyyades à Damas porte le nom de Jésus. C’est là qu’il descendra sur terre. Il reviendra pour 40 ans, éliminera l’Antéchrist (al-Dajjâl) et puis mourra. Jérusalem sera le centre de ces événements. La Mecque est donc supplantée par Damas et Jérusalem.

La tradition s’est enrichie au fil des siècles pour donner une place plus importante à Mahomet. Ainsi, à l’appel de l’ange Isrâfîl , « il se mettra debout, chassant la poussière de sa barbe bénie et de ses cheveux et regardera à sa droite et à sa gauche… ».

1991 : le bal des dupes

Le 2 août 1990, les troupes irakiennes envahissent leur petit voisin du sud, le Koweït. Saddam Hussein, le président de l’Irak, invoque trois prétextes :

  • Le surproduction du Koweït et des Emirats arabes a fait chuté le cours du pétrole de 19 à 10 $ le baril, faisant perdre 7 milliards de dollars par an à l’Irak.
  • L’Irak accuse le Koweït de creuser de nouveaux puits en oblique sous sa frontière.
  • Enfin, l’Irak considère le Koweït comme une province détachée de l’Irak par la Grande Bretagne en 1922.

Mais la vraie raison est ailleurs. La guerre meurtrière qui a opposé l’Irak à l’Iran vient de se terminer sans vainqueur. Guerre durant laquelle les Etats-Unis ont livré des missiles et des armes chimiques à l’Irak. L’Irak est exsangue et les pays qui ont financé la guerre réclame le paiement des dettes. Le Koweït a prêté 15 milliards de dollars à l’Irak, l’Arabie saoudite 45 milliards.

L’invasion a chassé l’émir du Koweït, cheikh Jaber Al-Ahmad, vers les Etats-Unis qui l’accueillent à bras ouverts bien qu’ils aient soutenu Saddam Hussein durant sa guerre contre l’Iran. Pour sa part, l’Arabie saoudite s’inquiète. La CIA lui a fait parvenir des photos d’une incursion des troupes irakiennes sur son territoire, photos qui ne seront jamais publiées. Fake news. L’Arabie demande l’aide des Etats-Unis. Après d’âpres discussions plus de 100.000 militaires américains sont déployés dans le nord de l’Arabie. C’est l’opération Bouclier du désert.

Cette installation des Américains va avoir des conséquences aussi énormes qu’inattendues. Un certain Oussama Ben Laden, dont la famille est très proche du pouvoir saoudien et qui a fait ses preuves militaires en Afghanistan avec le soutien des Américains, propose au roi Fadh d’utiliser sa milice pour défendre le pays contre les Irakiens. A la suite du refus du roi, il l’accuse de corruption et d’autoriser des infidèles à souiller le sol sacré de l’Arabie saoudite. Son passeport saoudien lui est retiré… l’histoire d’Al-Qaïda est en marche.

Aux Etats-Unis la propagande anti Saddam Hussein s’organise. De héros, il devient un monstre, un autre Hitler qui projette d’envahir tous ses voisins. Une ING se constitue : « Citizens for free Koweit » . L’émir Jaber loue les services de l’agence de communication Hill and Knowlton pour un montant de 12 millions de dollars (de l’époque). Cette agence fournit des films de propagande aux médias, elle analyse les réactions de la population américaine par une série de questions faisant appel à sa sensibilité. Enfin, elle tient son sujet. Le 14 octobre 1990, une toute jeune fille Nayirah, présentée par les médias comme une infirmière, dévoile l’innommable devant une commission du sénat américain : des soldats irakiens ont fait irruption dans une maternité de Koweït City et ont embarqué les couveuses pour les transporter en Irak, jetant au sol les nouveaux-nés. Elle est en pleurs : 22 bébés ont été assassinés.

Nayirah devant la commission du sénat américain

Amnesty International surenchérira, ce n’est pas 22 bébés mais 74 ! Nayirah continue : « Les Irakiens ont tout détruit au Koweït. Ils ont vidé les supermarchés de nourriture, les pharmacies de médicaments, les usines de matériel médical, ils ont cambriolé les maisons et torturé des voisins et des amis. J’ai vu un de mes amis après qu’il ait été torturé par les Irakiens. Il a 22 ans mais on aurait dit un vieillard. Les Irakiens lui avaient plongé la tête dans un bassin, jusqu’à ce qu’il soit presque noyé. Ils lui ont arraché les ongles. Ils lui ont fait subir des chocs électriques sur les parties sensibles de son corps. Il a beaucoup de chance d’avoir survécu. »

Mme Thatcher enjoint George Bush d’intervenir. Le Conseil de sécurité de l’ONU est convoqué. Un pédiatre koweïtien vient témoigner : il a vu la tombe de 122 enfants tués dans les maternités. La résolution 678 du 29 novembre 1990 adresse un ultimatum à l’Irak, qui a jusqu’au 15 janvier 1991 pour évacuer le Koweït, sous peine d’intervention militaire

Le 12 janvier 1991, le Sénat américain vote l’intervention militaire par 52 oui contre 47 non. Le 17, le journaliste Alexander Cockburn dénonce la supercherie dans un article : il y aurait 122 couveuses à Koweït City alors que le plus grand hôpital de Los Angeles n’en compte que 13. Mais c’est trop tard, la guerre est déclarée : c’est l’opération Tempête du désert. Trente quatre nations vont s’attaquer à l’Irak. La guerre durera 5 semaines.

Epilogue

La plupart des infrastructures de l’Irak ont été détruites. Le montant des réparations est estimé à 500 milliards de dollar. On estime à 150.000 le nombre d’Irakiens qui ont perdu la vie.

Le dernier convoi irakien, militaire et civil, à quitter le Koweït a été pulvérisé par l’aviation américaine.

732 puits de pétrole koweïtiens ont été incendiés et 20 millions de tonnes de pétrole déversés sur le sol.

La guerre a coûté aux alliés plus de 100 milliards de dollars, surtout financés par l’Arabie saoudite..

Le journaliste John Martin de la chaîne ABC a retrouve le médecin qui a témoigné à l’ONU. Ce n’est pas un pédiatre, mais un dentiste et il ne souvient plus où les enfants ont été enterrés. Un autre journaliste, Andrew Whitley a enquêté dans les 3 hôpitaux de Koweït City : les couveuses étaient bien en place et aucun enfant n’avait été tué par les soldats irakiens. Mais tant les infirmières que les médecins étaient convaincus que si leur maternité avait été épargnée, ça s’était bien passée dans les autres.

John Mac Arthur du magazine Harper’s a identifié l’héroïne de l’histoire, Nayirah. Elle s’appelle Nayirah Al-Sabah, c’est la fille de l’ambassadeur du Koweït à Washington, membre de la famille royale.

L’opinion publique est prête, les organismes de communication ont bien rôdé leur discours, les politiciens sont toujours aussi naïfs. Tout est prêt pour le deuxième acte : les armes de destruction massives.

Inspiré par le documentaire 1991, première guerre du Golfe de Bénédicte Delfaut