Panorama historique avant le XXe siècle
550 avant notre ère : empire achéménide. Il sera défait vers -330 par Alexandre le grand.
247 avant note ère, les Parthes (les Arsacides) chassent les descendants des généraux grecs (les Séleucides).
224 : les Sassanides instaurent le deuxième empire perse. Il sera aboli par les conquêtes arabes en 637. Au califat succéderont les Mongols puis Tamerlan (Timour Lang) et ses successeurs, les Timourides.
1502 : les Séfévides établissent un troisième empire dans lequel le chiisme devient la religion d’Etat.
1794, le dernier empereur perse est renversé par ses alliés, les Qadjars. Le pays devient un Etat tampon entre la Russie et la Grande Bretagne qui annexe l’Afghanistan en 1857.
1925, les Qadjars sont dépossédés et l’homme fort des Britanniques, Reza Khan Pahlavi, un cosaque, ministre de la guerre puis premier ministre est nommé à la tête de la Perse.
Les derniers feux de l’empire perse
En 1941, à cause de ses sympathies pour l’Allemagne nazie, les alliés forcent Reza Pahlavi a céder son pouvoir à son fils Mohammad Reza Pahlavi âgé de 21 ans. Les alliés avaient besoin d’un couloir pour approvisionner l’URSS en arme. Mohammad Reza Pahlavi rebaptise son pays Iran et devient le shah d’Iran, le premier et le seul.
Il va diriger l’Iran en autocrate au service de l’Occident. Il veut moderniser son pays, tout en restant en paix avec les religieux : il joue la carte des religieux contre les communistes. Bien qu’il effectue des pèlerinages à La Mecque, il est la cible d’un mollah : Rouhollah Mousavi Khomeini, né en 1902. Il faut dire que le shah a fait interdire le tchador en public et avec l’aide de la CIA, il a crée une police secrète, la Savak (1957) qui arrête, torture et exécute.

Son gros défaut est de prendre toutes les décisions seul. Les échecs politiques lui sont toujours imputés.
En 1963, après un référendum, il lance la révolution blanche. Les femmes obtiennent le droit de vote, le système féodal est supprimé, des paysans obtiennent des terres appartenant souvent à des religieux, et les campagnes sont alphabétisées. Que de sages décisions, mais les moyens ne suivent pas. Les paysans, sans outils, sans semences, abandonnent leurs terres pour gagner les villes où ils vivent dans les quartiers pauvres, aux mains des religieux. Khomeiny, nommé grand ayatollah s’insurge et parle de réaction noire, l’islam a été bafoué. Le shah le fait arrêter et l’exile à Nadjaf, ville sainte de l’Irak, où il va vivre en reclus durant 14 ans.
Le shah continue à accumuler les maladresses. En 1967, il se fait couronner empereur et, lui le roturier sans reconnaissance légale, se donne tous les titres des empereurs achéménides, comme « roi des rois« . Mieux, il fait couronner sa troisième femme, Farah Diba, épousée en 1959, qui pourra lui succéder.
Le shah cherche des partenaires pour la construction de centrales nucléaires et de barrages pour irriguer les terres. En 1967, il est en Allemagne où des membres de la Savak repoussent à coups de bâton les opposants qui manifestent. La police tue un manifestant. Cet incident va avoir de grandes conséquences, il est à l’origine des attentats des groupements d’extrême gauche en Allemagne.
En 1971, à Persépolis, le shah organise les festivités des 2500 ans de l’empire perse… dont on a vu qu’il n’a eu aucune continuité. C’est à un spectacle hollywoodien que tous les chefs d’Etat sont conviés… mais pas le peuple. Le shah a perdu le contact avec sa base. Il se prend pour le Roi Soleil. Aujourd’hui, Farah Diba qui vit à Paris, parle de son mari en utilisant l’expression « sa majesté » : sa majesté a fait ceci, sa majesté a dit cela.
Il fait construire des centres commerciaux, provoquant la ruine des artisans des bazars. Les oubliés de la modernisation se tournent vers les religieux. La révolte gronde. Un article dans un journal insulte Khomeiny. La foule manifeste dans la ville sainte de Qos fief de l’ayatollah. L’armée tire. Un incident va mettre le feu aux poudres sans jeu de mot : le cinéma Rex s’enflamme, 422 morts. L’incendie est imputée, à tort, au shah et à la Savak. Des manifestations contre le shah éclatent. L’armée tire de nouveau, il y aura 64 morts, mais l’opposition parle de 15.000 victimes. Le grève générale est décrétée. L’approvisionnement en pétrole est perturbé. L’Occident s’inquiète.
La république islamique
Giscard d’Estaing, le président français, invite l’américain Jimmy Carter, le premier ministre britannique James Callaghan et le chancelier allemand Helmut Schmidt à la Gadeloupe en janvier 1979, pour, entre autres, discuter de la situation en Iran. Ils lâchent le shah. Ils jouent la carte de Khomeiny pour ramener le calme, la stabilité et la démocratie en Iran. Pendant 14 ans, il s’est tenu à l’écart, ses écrits sont inconnus en Occident, on ne le connaît pas.
Fin 1978, le shah obtient l’expulsion de l’ayatollah de l’Irak. Il part pour la France où il est accueilli en ami. François Mitterrand, Jean-Paul Sartre, Michel Foucault lui rendent visite. Il ne fait pas de grands discours, répond vaguement lorsqu’on l’interroge sur la forme de gouvernement qu’il entrevoit pour l’Iran : une démocratie parlementaire, déclare-t-il.
En Iran, le shah, usé par le cancer qui le ronge, quitte l’Iran. Le pays vit un moment de liberté totale et de solidarité. Khomeini peut rentrer en Iran le 1er février 1979, après 4 mois passés à Paris. L’accueil est triomphal. L’armée, sans ordre de sa hiérarchie, n’intervient pas.

Les démocrates ne réalisent pas ce qui se passe. Ils restent sarcastiques, car l’ayatollah parle un drôle de dialecte, mélangeant le persan et l’arabe coranique. L’espoir reste de mise : « on arrivera bien à le mettre de côté ». Mais dans les manifestations, les partisans de Khomeini distribuent des tchadors. Et après la grande manifestation pour la journée mondiale de la femme (8 mars 1979), Khomeiny déclare : « les femmes ne peuvent pas se promener nues dans les rues« .

C’en est fini de la liberté. La police religieuse, souvent composée d’adolescents, va faire régner la terreur, s’attaquant aux femmes non voilées. Les opposants d’enfuient, ils traversent la frontière avec l’aide de Kurdes ou de trafiquants de drogue.
Le 4 septembre 1979, 52 employés de l’ambassade des Etats-Unis à Téhéran sont pris en otage par des « étudiants » iraniens. Ils sont accusés d’espionnage, ce qui fut avéré par les documents et les instruments découverts dans l’ambassade. Mais n’est-ce pas l’objectif de toute ambassade ? L’Iran réclame la livraison du shah qui se fait soigner à New York. Le shah devient encombrant, il sera prié de quitter les Etats-Unis en décembre 1979, il mourra en Egypte 7 mois plus tard. Le président Carter fait bloquer les avoirs financiers iraniens se trouvant dans les banques américaines. Les USA cessent les importations de pétrole iranien et expulsent des ressortissants iraniens.
Les otages seront libérés le jour de l’investiture de Reagan qui succède au démocrate Carter, le 20 janvier 1981, après 444 jours de détention. On ignore quelles ont été les modalités des négociations.
L’Occident réalise son erreur. En 1981, l’Irak, soutenu financièrement par l’Arabie saoudite et le Koweït, attaque l’Iran. Les Occidentaux (les Etats-Unis, la France, etc.) profitent de ce financement pour fournir à leur grand ami Saddam Hussein des armes conventionnelles et des composants pour armes chimiques. La guerre va durer 8 ans et faire un million de morts. Pour Khomeini, c’est une aubaine, tout le peuple est derrière lui.

Situation actuelle
Aujourd’hui, l’Iran est une république islamique. Le parlement est élu au suffrage universel… des hommes. Hassan Rohani en est le président. Depuis la mort de Khomeini, en 1989, c’est Ali Khamenei qui est le guide suprême de la révolution. Son turban noir montre sa prétention à descendre du prophète Mahomet.
Isolé, l’Iran s’est replié sur lui-même. Craignant ses voisins possédant l’arme nucléaire (Israël et les Pakistan), il entreprend un vaste programme d’enrichissement de l’uranium. Il est mis au ban des nations, comme signataire de l’accord de non prolifération de l’armement nucléaire.
En 1995, les USA décrètent un embargo sur le pétrole et en 2004, l’Iran ne peut plus recevoir d’assistance scientifique.
Bien entendu, tout ce que décide les Etats-Unis vaut aussi pour l’Occident qui se comporte en valet, ce que n’a pas manqué de souligner Ali Khamenei.
En 2015, éclaircie : un accord est signé pour l’arrêt de la fabrication d’armes nucléaires, sous contrôle international. C’était sans compter sur Trump qui en 2017, sort de l’accord… et menace de sanctions ceux qui sont restés fidèles à l’accord de Vienne : France, Allemagne, Grande Bretagne (la Chine et la Russie se sentent peu concernés).
Tous les projets économiques de l’Iran tombent à l’eau : construction d’un pipeline se raccordant à la Turquie pour alimenter l’Europe, de même que le raccordement au réseau irakien.
L’Iran se tourne donc vers l’est. Il soutient la Russie dans la guerre en Syrie. Il sera signataire de l’accord de paix entre la Turquie, la Russie et l’Iran. Et ouvre son marché à la Chine en échange de brut.
Pendant ce temps Trump et ses conseillers attendent que le peuple se révolte et instaure la démocratie à l’occidental… dont il a déjà goûté sous le shah. Il espère réaliser la même opération qu’en Syrie où les Etats-Unis avaient fourni des armes aux opposants de Bachar al-Assad et profité du front al-Nosra (al Qaïda), un allié de circonstance. Mais en Iran, il n’y a pas d’opposition structurée. Des manifestants sont bien descendus dans la rue pour protester contre l’augmentation du prix de l’essence, mais les slogans sont bien vite devenus anti-américains après l’assassinat, le 3 janvier 2020 par un drone, du général iranien Qassem Soleimani et de l’Irakien Abou Mehdi al-Mouhandis, numéro deux du mouvement pro-iranien Hachd al-Chaabi. Le peuple fait maintenant bloc derrière le guide suprême.
