Fêtes juives, fêtes chrétiennes

Jusqu’au IVe siècle de notre ère, les chrétiens et les juifs célébraient conjointement les fêtes liturgiques. La fixation des fêtes chrétiennes débuta au concile de Nicée en 325.

La Pâque juive célèbre la sortie d’Egypte des Hébreux sous la conduite de Moïse. Les Pâques chrétiennes, célébrées le dimanche suivant, rappellent la résurrection de Jésus. Jésus aurait été crucifié le vendredi et serait ressuscité trois jours plus tard, … le dimanche. Arithmétique chrétienne. Dans l’Évangile de Jean, la crucifixion a lieu le jeudi. Le compte est bon.

Dans la mythologie chrétienne, l’Ascension correspond au dernier jour que Jésus a passé parmi les apôtres, après sa résurrection. Il était resté sur terre quarante jours. 40 est un nombre passe-partout dans la Bible. Il est synonyme de beaucoup. Il a plu 40 jours lors du déluge, Moïse est resté 40 jours sur le mont Sinaï, les Hébreux ont erré 40 années dans le désert, David et son fils Salomon ont régné 40 ans, Jésus a passé 40 jours dans le désert, etc.

Cinquante jours après Pâque (Pessah), 7 semaines dans l’arithmétique juive, on célèbre la fête des moissons (Chavouot). Cinquante jours après Pâques, les chrétiens fêtent la Pentecôte. Dix jours après l’ascension de Jésus, les apôtres ont reçu la visite du Saint-Esprit (le troisième avatar de Dieu) qui leur a donné le don des langues pour qu’ils puissent partir en mission pour convertir tous les peuples.

Les calendriers

Calendrier hébraïque

Le calendrier hébraïque a évolué au fil du temps. Au départ, il comportait 12 mois lunaires de 29 ou 30 jours, soit 354 ou 355 jours par année. La découpe du mois en semaines, probablement héritée des Babyloniens, correspond au temps mis par Dieu pour créer le monde. La semaine débute la nuit du dimanche au lundi. Le septième jour, shabbat, est chômé : Dieu se reposa le septième jour.

Les Hébreux étant un peuple de cultivateurs, les travaux des champs et les fêtes religieuses qui les accompagnaient se décalaient de 11 jours tous les ans par rapport à l’année solaire, aussi appelée année tropique.

Le premier mois de l’année est le mois de Nissan. Il doit obligatoirement commencer après l’équinoxe de printemps, car c’est la période de germination de l’orge. Un mois commence toujours à la nouvelle lune. La Pâque est fêtée à la pleine lune du mois de Nissan (le 15), elle célèbre la sortie d’Egypte. Pour rapprocher l’année lunaire de l’année solaire (équinoxe) on ajoutait des jours intermédiaires… selon le bon vouloir du grand prêtre, puis du Sanhédrin.

Ce n’est que sous la domination grecque que le calendrier se réforma. On adopta le cycle métonique qui était déjà connu des Babyloniens. Ils avaient remarqué que la durée de 19 années solaires était très proche de celle de 235 mois lunaires. Or, 19 années de 12 mois font 228 mois. Il suffit donc d’ajouter un mois supplémentaire dans 7 années sur 19 (235 – 228 = 7) pour que les années restent proches des années solaires. On ajouta donc un mois, juste avant le mois de Nissan, aux années 3, 6, 8, 11, 14, 17 et 19.

Le départ du calendrier, qui correspond au dimanche 6 octobre -3761 du calendrier julien, fut fixée en 358 de notre ère. Ce jour correspond à la création du monde selon la Bible.

Aujourd’hui, les juifs utilisent le calendrier grégorien, le calendrier international. Le calendrier hébraïque ne sert qu’à déterminer les dates des fêtes.

Calendrier musulman

Les musulmans ne se sont pas posé tant de questions, ils utilisent toujours le calendrier lunaire de 12 mois de 29 ou 30 jours, soit une année de 354 ou 355 jours… sans synchronisation avec l’année solaire. Les mois glissant de façon rétrograde par rapport à l’année solaire. Le mois commence lorsque le premier croissant de lune est visible à l’œil nu. Ce qui veut dire que le mois ne commence pas à la même heure dans tous les pays. Parfois pas le même jour !

Le départ du calendrier a été fixé au 16 juillet 622 qui correspond au début de l’année lunaire qui vit Mahomet quitter La Mecque pour Médine (le 24 septembre). Le Coran interdit expressément d’ajouter un mois pour synchroniser le calendrier et l’année solaire. Ce qui indique clairement que les rédacteurs du Coran n’étaient pas des cultivateurs.

Calendrier chrétien

Le calendrier chrétien est l’héritier du calendrier romain mâtiné de la semaine juive.

Il semble qu’au départ, le calendrier romain, sous la royauté, ne comportait que 10 mois de 31 ou 30 jours :

  • Martius (en l’honneur du dieu Mars),
  • Aprilis (en l’honneur de la déesse étrusque de la fertilité : Apru),
  • Maius (à l’étymologie douteuse : la déesse Maïa ou les ancêtres : Maiores),
  • Iunius (pour Junon)
  • puis ça se simplifie : Quintilis (cinquième mois), Sextilis (sixième mois), September, October, November et le dixième mois, December.

Au fil du temps, deux mois furent ajoutés après December, Ianuarius en l’honneur du dieu Janus et Februarius dédié à Pluton, le dieu des Enfers (aussi appelé Februus).

Le calendrier comptait 3 jours de référence :

  • les calendes : premier jour du mois.
  • les nones : le cinquième ou le septième jour du mois, suivant celui-ci (en mars, mai, juillet et octobre, les nones tombent le septième jour).
  • les ides : le treizième ou quinzième jour du mois.

Pour désigner un jour, on disait le jour avant/après les calendes de mars par exemple ou le 4ème jour après les ides d’avril. Pas très simple.

A l’époque de Jules César, il existait un décalage de trois mois entre le calendrier civil et les saisons. Il décréta que l’année comporterait 365 jours et que tous les quatre ans, on ajouterait un jour au mois de février. C’est le calendrier julien. Pour aligner le calendrier, l’année 46 avant notre ère, compta 445 jours !

En l’honneur de Jules César, le mois de sa naissance, Quintilis devint Iulius (juillet).
On célébra aussi l’empereur Auguste en lui attribuant un mois, Sextilis, mois de sa mort qui devint Augustus (août). Mais ce mois n’avait que 30 jours. On le fit passer à 31 jours et on décala les autres mois.

Lorsque le christianisme s’imposa dans l’Empire romain, la semaine de 7 jours fut adoptée, et on donna aux jours le nom des planètes connues : Lune, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne et Soleil (sunday). Ce n’est que plus tard que le jour du Soleil devint le jour du Seigneur (dominus) dans les langues latines, soit dimanche.

Au concile de Nicée en 325, il avait été établi que la résurrection de Jésus (Pâques) serait célébrée le dimanche qui suit la Pâque juive, soit le premier dimanche qui suit la première pleine lune du printemps. En 325, l’équinoxe du printemps correspondait au 25 mars. En 1579, le pape Grégoire XIII, s’inquiéta que l’équinoxe tombât le 11 mars. Il demanda à des mathématiciens et des astronomes de calquer l’année civile sur l’année tropique : le calendrier subit sa dernière réforme. Seront considérées comme bissextiles les années divisibles par 4 mais pas par 100 (1700, 1800, 1900)… sauf si elles sont divisibles par 400 (1600, 2000, 2400). Le calendrier fut d’application en octobre 1582. Cette année-là, le jeudi 4 octobre fut suivi du vendredi 15 octobre.

Mutazilisme

Dans mon article précédent, j’ai mentionné la mosquée Fatima qui devrait s’ouvrir en France. Le projet est porté par l’imame Kahina Bahloul et par Faker Korchane qui est professeur de philosophie et président de l’association pour la renaissance de l’islam mutazilite.

Qu’est que le mutazilisme ? C’est un courant qui s’est développé très tôt dans l’islam, parallèlement aux courants sunnites et chiites traditionalistes.

En 833, le calife Al-Mamun, prend le parti des mutazilites qui professent que le Coran est, certes, inspiré par Dieu, mais néanmoins une création de l’homme. Ils assimilent la doctrine basée sur un Coran incréé à la doctrine chrétienne selon laquelle la Parole de Dieu, qui est le Christ pour les chrétiens, serait incréée et éternelle, comme Dieu. Cette doctrine professerait donc du polythéisme. Le Coran incréé et l’omniscience de Dieu entraîne un autre problème : comment se fait-il que certains versets aient été abrogés et remplacés par d’autres… meilleurs ? La notion du bien (halal) et du mal (haram) est-elle relative ?

Sous Al-Mamun, le mutazilisme devient la « religion » officielle. Cette doctrine est influencée par les textes des philosophes grecs qui sont en train d’être traduits en arabe et surtout par Aristote pour qui « une puissance impersonnelle, imperturbable et parfaitement indifférente au sort de l’humanité anime l’univers ».  Donc, pour les mutazilites, Dieu est distinct du monde humain, il n’est pas situé dans le temps ni dans l’espace, il n’a pas d’attributs anthropomorphiques, il n’a pas de mains, ni de corps. Il ne parle pas. L’homme est responsable de ses actes, il n’est pas prédestiné. Les sunnites et les chiites sont dans l’erreur, mais on doit l’accepter. Cette apparente liberté d’esprit n’a pas empêché des persécutions contre les opposants religieux au calife.

L’islam entre alors dans une période de grande tolérance religieuse qui sera poursuivie par les deux successeurs d’Al-Mamun, son frère, Al-Mutachim et son neveu Al-Wathiq.

Mais dès 848, le nouveau calife, Jafar Al-Mutawakkil, pressé par les cadis et les traditionalistes rétablit la doctrine sunnite : le Coran est incréé et a été dicté par Dieu à Mahomet. Depuis, une chape d’obscurantisme s’est abattue sur l’Islam ! Mais le mutazilisme n’est pas mort, il fait reparler de lui de temps à autre, dans les milieux intellectuels… mais timidement.

Ainsi, le grand mufti d’Égypte élu en 1899, Cheikh Mohamed Abdouh souhaitait réformer l’islam en apportant des changements dans l’enseignement de l’université d’al-Azhar. Il reçut même le soutien du dernier « roi » (le khédive) d’Egypte Abbas II (1892-1914) qui avait étudié en Europe. Mais face à l’opposition des traditionalistes, il abandonna sa charge et mourut en 1905.

En février 2017, l’Association pour la renaissance de l’islam mutazilite a été créée en France. Pour cette association, le mutazilisme est un héritage qu’il convient d’adapter au XXIe siècle. Ce n’est pas un ensemble de dogmes prêts à l’emploi, mais une disposition de l’esprit : « celle qui consiste à appliquer le doute, la prudence et l’esprit critique sur l’histoire, les pratiques et les textes de l’islam et celle qui consiste à garantir la liberté de l’individu à décider par lui-même de ce qui lui paraît bon ou mauvais dans sa vie spirituelle » .

Haram signifie interdit, illégal, mais aussi sacré, inviolable.

Où sont les femmes ?

C’est la question que l’on peut se poser en voyant les fidèles d’une mosquée. En fait, elles sont cachées, soit derrière un paravent (moucharabieh) soit à l’étage. De toutes façons, hors de la vue des hommes. Quelles sont les raisons de cet ostracisme ? Tout d’abord, les musulmanes ne sont pas obligées d’assister au prêche du vendredi, ensuite, elles ne peuvent pas distraire les hommes… elles pourraient provoquer leur « chute » en éveillant leur désir, comme l’a écrit Tertullien aux sujet des femmes chrétiennes. Cela me rappelle une scène du film d’animation autobiographique (Persépolis : 2007) de la dessinatrice iranienne, Marjane Satrapi. A l’université de Téhéran, son professeur lui reproche sa tenue non conforme (son foulard est mal noué). Elle lui demande alors d’obliger ses condisciples masculins à cacher leurs bras et leur cheveux, car leur vue l’excite sexuellement ! Mais cet aspect des choses, la sexualité féminine, a échappé aux mâles dominants.

Est-ce que cela peut changer ? Apparemment. En France, deux projets de mosquées mixtes pourraient voir le jour : les mosquées Fatima et Simorgh (oiseau mythologique perse). Elles seront ouvertes à tous, croyants et non-croyants. Le foulard ne sera pas obligatoire. Les femmes prieront dans la même salle que les hommes… mais les uns à droite et les autres à gauche, comme dans les églises chrétiennes d’il y a quelques années. Et dans la mosquée Fatima la prière sera dirigée, en français, par une femme imam : Kahina Bahloul.

Qu’en est-il du judaïsme ? Pour les juifs, le père a l’obligation d’enseigner la Torah à ses fils… mais pas aux filles car comme le dit le Talmud : « Il ne lui transmettrait que des futilités. » De nos jours, les femmes ont accès aux études des textes sacrés, même chez les juifs orthodoxes.

Si dans la plupart des synagogues, les femmes sont séparées des hommes, il n’est pas rare que des femmes rabbins dirigent l’office du samedi et que des femmes soient appelées à venir lire la Torah.

Et dans le christianisme ? Dans le protestantisme, les femmes peuvent officiellement être pasteures depuis 1965, en France. C’est même une femme qui y préside le Conseil national de l’Église protestante réunie : Emmanuelle Seyboldt.

On est loin de ces ouvertures dans le catholicisme. Saint Paul n’a-t-il pas dit : « Que les femmes se taisent dans les assemblées (Co. 4, 34-35). » Jean-Paul II a clos le débat en 1994 dans la déclaration « Ordinatio Sacerdotalis » : « L’Église n’a en aucune manière le pouvoir de conférer l’ordination sacerdotale des femmes et cette position est définitive. » Cette interdiction a été confirmée par Benoît XVI et François Ier qui a déclaré : « Le dernier mot, clair, a été dit par saint Jean-Paul et cela demeure ainsi. » Le prêtre est l’image du Christ ! De plus, les femmes en raison de leurs menstruations ne peuvent pas s’approcher de l’autel.

Jusqu’en 1054, les femmes pouvaient être diacres (diaconesses). Même Paul cite Phoebé, « notre sœur, ministre de l’Église ». Un diacre, célibataire ou marié, est l’assistant d’un prêtre ou d’un évêque. Il peut célébrer des baptêmes et des mariages dans des circonstances exceptionnelles. Par contre, il ne peut pas recevoir la confession, ni consacrer le pain et le vin. De nos jours, malgré l’appel à l’ouverture, les diaconesses ne sont pas reconnues car le diaconat prépare à la prêtrise qui est inaccessible aux femmes.

Sources : Le Monde des religions n° 95 – mai 2019. Articles de Bénédicte Lutaud, Virginie Larousse et Macha Fogel.