Les évangiles

Entrons tout de suite dans le vif du sujet : on ne sait pas qui les a écrits, on ne sait pas quand ils ont été écrits, on ne sait pas où ils ont été écrits et on ignore pourquoi ils sont quatre et pourquoi ce sont ceux-là qui ont été choisis. Voilà, tout le reste n’est que conjectures. Bien entendu, la tradition répond à toutes ces interrogations… et la plupart des historien.ne.s s’en contentent, par confort (ou par paresse ?) intellectuel ou par croyance personnelle. On en est au même stade qu’avec la vie de Mahomet et le récit des patriarches juifs. Pour la plupart des historien.ne.s et des universitaires, le document de référence est l’Histoire ecclésiastique écrite au IVe siècle par Eusèbe de Césarée… qui est (très) loin d’apporter toutes les preuves de la véracité de ses dires (voir l’article sur la généalogie de Jésus).

Les évangiles selon la tradition

Les évangiles racontent la vie de Jésus, sa naissance, son baptême par son cousin Jean qui, à cette occasion a reçu le qualificatif de « Baptiste », sa prédication en Galilée, sa montée à Jérusalem où il sera arrêté, jugé et crucifié, et enfin, les évangiles racontent sa résurrection. Quatre évangiles ont été retenu pour figurer dans le Nouveau Testament : ceux de Matthieu, de Marc, de Luc et de Jean. D’autres évangiles, qui nous sont parvenus, étaient également candidats.
Notons que les manuscrits les plus anciens de l’Évangile de Marc ne comprennent pas les derniers versets relatant la résurrection  de Jésus (16, 9-20). La TOB (Traduction œcuménique de la Bible) note : « Selon les meilleurs manuscrits, l’Évangile de Marc se termine au verset 16, 8 »

Évangile signifie « bonne nouvelle » en grec, ce qui pose parfois des problèmes de compréhension. Ainsi, dans les épîtres de Paul, les traducteurs ont retenu : « Je vous ai apporté l’évangile ». Doit-on comprendre, comme le suggèrent plusieurs chercheurs, qu’il existait un évangile initial, datant des années 40 de notre ère et que ces chercheurs n’hésitent pas à identifier comme un évangile en araméen dû à Matthieu… dont on n’a jamais retrouvé la moindre trace ? Ou faut-il lire « Je vous ai apporté la bonne nouvelle » ?

La datation des évangiles selon la tradition

L’évangile selon Marc, écrit dans un grec populaire, aurait été rédigé durant la révolte de 67-70. Marc aurait été un compagnon de Pierre. Il reflète la désolation qui régnait parmi les Juifs pour lequel l’évangile aurait été écrit. Jésus y apparaît crucifié, abandonné de Dieu tout comme les Juifs l’ont été tout au long de la guerre contre Rome. Le messie n’est pas venu au secours de son peuple. L’Évangile de Marc, du moins sa version courte, se termine par un constat d’échec et une petite lueur d’espoir : le corps de Jésus a disparu.

Pourquoi dater cet évangile d’avant 70 ? Dans le texte, Jésus dit, en parlant de Jérusalem : « Tu vois ces grandes constructions. Il ne restera pas pierre sur pierre, tout sera détruit » (Marc 13, 2). Comme le temple a été incendié en 70, on a considéré que ces paroles étaient prophétiques. On peut objecter que le texte pourrait avoir été écrit après les événements pour conforter la vision de Jésus… ou que le texte parle de la destruction de Jérusalem sur ordre de l’empereur Hadrien… en 135. Dans ce cas, il n’est plus resté pierre sur pierre, tout a été rasé : « la charrue a été passée sur la ville« .

L’Évangile selon Matthieu aurait été écrit environ 20 ans après la destruction du temple de Jérusalem, du moins à ce que l’on croit. Il promeut la doctrine de Jésus face à un judaïsme en pleine mutation. Jésus y est présenté comme un prophète juif, qui tel Moïse prêche sur la montagne. Matthieu n’hésite pas à livrer la généalogie de Jésus, c’est un descendant direct d’Abraham.
À l’époque, les pharisiens tentent de rassembler les juifs autour des rabbins qui inventent un judaïsme basé sur les synagogues alors que le temple a disparu. Matthieu aurait voulu les contrer et présenter une alternative : la doctrine de Jésus. Il n’hésite pas à attaquer les pharisiens responsables selon lui de la mort de Jésus.
L’évangile aurait été écrit en Galilée où s’étaient réfugiées les diverses communautés juives. Jésus est l’avenir du judaïsme, Jésus est apparu à ses disciples en Galilée, il leur a ordonné de répandre sa parole.

La datation a été choisie en opposition au judaïsme qui se reconstruit et aussi parce qu’on estime que cet évangile se serait inspiré de celui de Marc, donc, il doit lui être postérieur.

L’Évangile selon Luc veut inscrire les chrétiens dans l’environnement romain. Il aurait été écrit à la même période que celui de Matthieu. Ici, loin de la Palestine, Luc rompt déjà avec les juifs. Jésus conseille de prêcher sa doctrine aux gentils, aux non juifs. La biographie, qu’il nous donne, fait de Jésus un fils non plus d’Abraham, le père des Juifs, mais d’Adam, le père de toute l’humanité. Luc aurait été un lettré, compagnon de Paul. Son grec est très académique. Il présente Jésus comme un juif cultivé, qui très jeune lit et interprète les textes de la Torah.

Ces trois premiers évangiles sont dit synoptiques, car ils racontent les mêmes événements et citent les mêmes paroles attribuées à Jésus, parfois dans des contextes différents.

L’Évangile selon Jean est plus tardif et plusieurs fois modifié, il est traditionnellement daté de 90 ou 100. Il consomme la rupture d’avec les juifs.
Son récit est totalement différent de celui des autres évangiles. Jésus meurt avant la Pâque alors que dans les autres évangiles, il participe au repas pascal avec ses disciples. Sa mort ne survient pas à sa première visite à Jérusalem, mais à son troisième voyage.
l’Évangile de Jean procède par symbole, il est écrit dans un milieu philosophique grec. Contrairement à l’évangile selon Marc, Jésus est très serein, il contrôle parfaitement la situation. Tout ce qui arrive est prévu.
Jean n’est plus juif. Il ne lutte plus contre les pharisiens, les chrétiens ont perdu la bataille de l’orientation du judaïsme après la destruction du temple. Les chemins se sont séparés, c’est maintenant le juif qui est l’ennemi et plus seulement les pharisiens.

L’Évangile de Jean est différent des autres car il date d’une autre époque, où la doctrine chrétienne avait déjà dû s’adapter aux positions prises par le judaïsme concurrent. Mais peu importe, l’objectif n’est pas la vérité historique. Les évangiles ne sont pas des livres d’Histoire. Ils interprètent la vie de Jésus telle qu’on se l’imaginait dans les communautés où ils ont été écrits en se référant aux passages de la Bible. L’exemple le plus frappant est la description de la crucifixion (voir l’article) qui se emprunte au psaume 22, au Livre d’Isaïe et au Livre de l’Exode.

Pourquoi trois évangiles synoptiques ?

Pourquoi trois évangiles sont-ils si proches ? Cette question occupe les chercheurs depuis de nombreuses années. Un consensus semble se dégager : une source commune, ancienne, aurait été utilisée. Elle ne contentait que les paroles de Jésus à partir desquelles les évangélistes auraient imaginé son histoire. Le texte a reçu le nom de « Q » (de l’allemand « Quelle » : la source). Marc aurait écrit son évangile, puis à partir de Q et de Marc, Luc et Matthieu auraient écrit le leur.

Je n’aime pas cette théorie qui conforte la position traditionnelle de l’Eglise : des évangiles écrits par une seule personne, dans la seconde moitié du Ier siècle. De plus, on n’a aucune trace du document Q et aucun Père de l’Église n’en parle. [ NB : On appelle « Pères de l’Église » les auteurs des premiers siècles dont les écrits ont contribué à élaborer la doctrine.] J’exposerai non hypothèse sur les synoptiques dans le chapitre suivant.

Quand ont été écrits les évangiles ?

Les historien.ne.s pensent qu’Athanase d’Alexandrie fut le premier en 367 à définir les textes canoniques. Donc, le Nouveau Testament en tant qu’ouvrage compilé a mis un certain temps avant de voir le jour. En fait, Athanase établit la liste des textes qui pouvaient être lus dans les églises. La liste a été ratifiée au concile d’Hippone en 393 et confirmée au concile de Carthage en 397. Une liste contenant les 4 évangiles, avait déjà été proposée au concile de Laodicée vers 364.
La version de saint Jérôme de Stridon, écrite en latin vers 405, ne devint la version officielle de l’Église catholique qu’au Concile de Trente… en 1546 ! Les textes originaux étaient écrits en grec.

Ça c’est pour la version visible, publique des textes. Mais quand ont-ils été écrits ?
Trois méthodes permettent de dater les textes anciens.
(1) En se basant sur les copies anciennes. Nous n’avons aucun manuscrit des évangiles avant la fin du IIe siècle. Ce sont des papyrus trouvés en Égypte, tous écrits en grec.
Un doute subsiste sur un tout petit fragment de papyrus, pas plus grand qu’une carte de crédit, qui contient 105 caractères, écrits au recto et au verso. Ce seraient un passage du chapitre 18 de l’Évangile de Jean. Il daterait de 125 ou 140 ou 150… ou de beaucoup plus tard selon les spécialistes (papyrus Rylands P52).

Papyrus Rylands P52

(2) En relevant des citations des évangiles dans d’autres sources. Certains auteurs du IIe siècle citent des passages qu’on retrouve dans les évangiles, mais sans citer leurs sources. Ce qui est étrange, c’est qu’aucun auteur chrétien des Ier et IIe siècles ne semble connaître la vie de Jésus ! Même dans le Nouveau Testament, à part les évangiles, nulle épître ne cite un événement se rapportant à Jésus, sauf sa crucifixion et sa résurrection. Tout se passe comme si sa vie était un mystère, une énigme… ou que personne ne s’en était intéressé.
Irénée (130-202), évêque de Lyon, est le premier à citer le nom des quatre évangiles mais soit il ne les a pas lu, soit ils sont différents de ceux d’aujourd’hui. Car il prétend que Jésus est né la 41ème année du règne d’Auguste, soit en 14 de notre ère, et qu’il est mort à l’âge de 50 ans, en 64 ! Il insiste, et traite d’hérétiques ceux qui disent que Jésus n’a prêché qu’un an et qu’il est mort à l’âge de 30 ans… » un âge trop tendre ».

(3) En analysant les événements décrits dans les évangiles. J’ai déjà évoqué le passage de l’Évangile de Marc parlant de la destruction de temple. Mais rien de bien concluant.

Ces différentes méthodes ne font pas progresser la recherche. Y a-t-il d’autres pistes ?

A la recherche d’une autre vérité

Nous avons deux textes anciens : l’Évangile de Thomas et le Didachè. Ils dateraient tous les deux de la fin du Ier siècle, bien que l’Évangile de Thomas ait probablement été modifié au IIe siècle par les gnostiques. L’Évangile de Thomas, retrouvé à Nag Hammadi en Egypte en 1945, contient 114 logia (paroles) de Jésus. Il ne parle pas de sa vie, ni de sa crucifixion, ni de sa résurrection.
Exemple : 81 – Jésus dit : « Celui qui est devenu riche, qu’il devienne roi, et celui qui a la puissance, qu’il y renonce« .

Le Didachè, ou Enseignement des douze apôtres, retrouvé en 1873, contient des prescriptions liturgiques et un enseignement moral. Il met l’accent sur l’existence de prophètes itinérants que chaque communauté doit accueillir, loger, nourrir et surtout écouter. J’ai cité le passage du Didaché dans un autre article. C’est une vision différente de la tradition qui veut que le christianisme ne s’est répandu que grâce aux actions des apôtres (l’Église de Jérusalem) et de Paul. Or un évangile, celui de Luc mentionne ces itinérants : « N’emportez pas de bourse, pas de sac, pas de sandales… Dans quelque maison que vous entrez, dites d’abord ‘Paix à cette maison’… Demeurez dans cette maison, mangeant et buvant, ce qu’on vous donnera, car le travailleur mérite son salaire. » (Luc 10, 4-7).
Il semble qu’il y ait eu au Ier siècle de notre ère plusieurs mouvements christiques totalement indépendants.

Un autre texte, bien identifié et daté, est l’évangile de Marcion , auquel j’ai consacré un article. Cet évangile date de 140. Il ne nous est pas parvenu, car Marcion a été traité d’hérétique, mais son contradicteur, Tertullien (160-220), le cite abondamment. Pour Marcion, Jésus n’était pas un homme, mais une espèce d’ange, apparu sous la forme d’un homme de 30 ans à Capharnaüm. Donc, à cette époque, la figure de Jésus n’était pas encore fixée. Était-ce un sage, un prophète, le messie attendu par les Juifs, un zélote combattant les Romains, un ange, le fils de Dieu, le fils de l’Homme, le Logos (la parole de Dieu) ?
Chaque mouvement, chaque assemblée produisait ses propres écrits basés sur sa vision de Jésus, si tel était bien son nom. Jésus, en hébreu Yeshoua, signifie « celui qui sauve ». Or à cette époque, dans tout l’Empire romain, on célébrait le culte de « sauveurs », soter, en grec. J’en reparlerai.

Probablement suite aux révélations de Marcion, les textes ont été unifiés. Les synoptiques n’ont peut-être pas été créés tels quels, ils ont été remaniés pour raconter la même histoire. D’ailleurs, vers 176, un grammairien romain, écrivant en grec, Celse publie « le Discours véritable », une attaque contre les chrétiens. Bien entendu, ce texte a été perdu, jamais recopié par les moines transmetteurs des traditions, mais on le connaît par le chrétien Origène (185-253) qui a écrit « Contre Celse ». On y lisait, d’après Origène :

«La vérité est que tous ces prétendus faits ne sont que des récits que vos maîtres et vous-mêmes avez fabriqués, sans parvenir seulement à donner à vos mensonges une teinte de vraisemblance, bien qu’il soit de notoriété publique que plusieurs parmi vous (…) ont remanié à leur guise, trois ou quatre fois et plus encore, le texte primitif de l’évangile, afin de réfuter ce qu’on vous objectait »

Notons qu’Origène ne fait pas référence au passage de Flavius Josèphe sur Jésus pour défendre sa position. Ce passage n’existait probablement pas encore à cette époque.

Personnellement, je crois donc que les évangiles ont été rédigés à partir de textes anciens plusieurs fois remaniés. En 150, Justin parle « des mémoires des apôtres« , pas des évangiles. Est-on dans le même contexte que l’islam, où la « biographie » de Mahomet (la Sîra) aurait été écrite par ibn Ishaq à la demande du calife, al-Mançur (745-775), dont le fils se posait la question : « Mais qui était donc Mahomet ? ». (Cette version de la Sîra ne nous est pas parvenue.)
Pour les évangiles, on peut imaginer le même scénario : dans les premières communautés créées par un prédicateur, on peut l’appeler Paul, des jeunes de la troisième ou quatrième génération se sont demandés : mais qui est ce Jésus-Christ dont on nous parle ?

Il est certain qu’une trame ancienne a existé sinon pourquoi lirait-on : « Je vous le dis en vérité, cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive« . (Et les chrétiens attendent toujours !) Cette sentence se trouve dans les trois évangiles synoptiques. Mais ensuite, les textes ont été remaniés. Loin d’être des initiatives personnelles et isolées, les évangiles, tels que nous les connaissons procèdent d’une stratégie concertée pour présenter une histoire crédible pour un auditoire gréco-romain. Toute une série d’ouvrages fantaisistes ont été cachés aux adversaires du christianisme, c’est le sens du mot « apocryphe« . Exit donc le hareng ressuscité par Pierre (les Actes de Pierre) ou le coq, également ressuscité, envoyé par Jésus pour espionner Judas (Le livre du coq, qui est un livre sur la passion de Jésus). Mais ces textes ont continué à circuler dans les cercles chrétiens puisqu’ils nous sont parvenus.

Annexe : papyrus et parchemin, rouleaux et codex.

Depuis l’annexion de l’Égypte par Octave, empereur sous le nom d’Auguste, Rome détient le monopole du commerce du papyrus, un support de l’écriture fabriqué à partir des plantes qui poussent en abondance sur les rives du Nil. Ce matériau est très bien adapté à l’écriture : il est ligné de par sa fabrication qui consiste à coller des bandelettes de tiges ramollies dans l’eau et il permet une écriture souple et rapide. Il a favorisé la diffusion de la culture dans l’Empire romain. Les ouvrages se présentaient soit en rouleau, soit sous forme de codex, l’ancêtre de nos livres : des feuilles de papyrus, écrites recto-verso étaient cousues pour former un livre. Ce sont des codex d’une bibliothèque gnostique qui ont été découverts à Nag Hammadi, en Egypte, en 1945.

Après la perte de l’Egypte, occupée par les Arabes au VIIe siècle, la source des papyrus s’est tarie. On en est revenu au parchemin pour conserver les textes. Le parchemin est obtenu à partir de peaux d’animaux, essentiellement les ovins et les bovins. Un parchemin extra fin, le vélin, est obtenu à partir de la peau d’un animal mort-né. Le traitement de la peau est un long processus. Le parchemin est très coûteux et difficile à utiliser : la peau n’absorbe pas l’encre, les scribes doivent travailler avec précaution, chaque trait doit se faire d’un mouvement précis et rapide pour ne pas étendre l’encre. Rédiger une Bible pouvait prendre une année. Un scribe n’écrivait que quelques dizaines de lignes par jour. Vu le coût des ouvrages, la culture se mit à décliner.

Les manuscrits les plus anciens, les plus complets, contenant l’Ancien et le Nouveau Testament sont le codex Vaticanus et le codex Sinaiticus. Ils sont écrits sur parchemin, sur vélin pour être précis.
Le premier fait partie de la bibliothèque vaticane et a une existence certaine depuis 1475, où il a été répertorié. On le date généralement du IVe siècle. Ce serait une des 50 copies que l’empereur romain Constantin aurait commandées. Mais on ignore si cette commande a réellement été faite et si les exemplaires ont été écrits. Il retranscrit l’Ancien et le Nouveau Testament sur près de 800 pages.

Le second a été découvert par Constantin von Tischendorf lors de ses voyages en Orient entre 1844 et 1859. Il daterait également du IVe siècle. von Tischendorf aurait reçu le manuscrit du supérieur du monastère orthodoxe de Sainte Catherine au pied du mont Sinaï pour en faire don à l’empereur russe Alexandre II. C’est la version officielle.
Car par la suite, le supérieur du  monastère a accusé Constantin von Tischendorf de lui avoir volé le manuscrit. Les pages de ce manuscrit ont été disperses. Elles sont conservées à Londres, à Leipzig, à Saint-Pétersbourg, et il reste quelques pages dans le monastère du Mont Sinaï.

La généalogie de Jésus

Non seulement les évangiles nomment les frères de Jésus (voir l’article), mais ils donnent la liste de ses ancêtres, ou du moins de son « père », Joseph. Ce qui embarrasse bien le dogme catholique : pourquoi Dieu aurait-il des ancêtres humains ?

Deux évangiles reprennent in extenso la généalogie de Jésus. Matthieu la fait remonter à Abraham et Luc la pousse jusqu’à Adam. Ces deux listes de noms ne correspondent pas, le seul ancêtre commun est le roi David ! Cette discordance n’a pas empêché le cardinal français Danielou (1905-1974) d’affirmer que les évangélistes avaient fait un travail d’historiens en consultant les archives de la famille de Jésus… une famille pauvre d’un petit hameau de Galilée, s’il faut en croire la tradition !

Intéressons-nous aux arbres généalogiques. Prenons comme exemple, les ancêtres directs de Joseph, « père » de Jésus.
Pour Matthieu : Eléazar engendra Mathan qui engendra Jacob qui engendra Joseph.
Pour Luc : (dans l’ordre inverse) Joseph fils de Héli, fils de Matthat, fils de Lévi, fils de Melchi

Au premier coup d’œil, on voit les différences : Joseph est-il le fils de Héli ou de Jacob ? Si vous vous posez la question, c’est que vous n’avez rien compris. C’est Eusèbe de Césarée qui le dit dans son Histoire ecclésiastique (livre I, chapitre 7) écrite au IVe siècle : les deux généalogies sont exacts et strictement identiques.
Explication : Joseph est bien le fils de Jacob. Mais à la mort de celui-ci, sa veuve épousa le frère de Jacob, Héli. Joseph devint donc le fils d’Héli. Et voilà. Il reste à appliquer le même raisonnement à tout le tableau. On en déduit que les hommes mourraient avant leur femme et qu’il y avait toujours un frère non marié pour épouser sa veuve, en vertu de la loi du lévirat (NB : levir veut dire beau-frère en hébreu) : « Lorsque des frères demeureront ensemble, et que l’un d’eux mourra sans laisser de fils, la femme du défunt ne se mariera point au dehors avec un étranger, mais son beau-frère ira vers elle, la prendra pour femme, et l’épousera comme beau-frère » (De. 25, 5).

Bien joué Eusèbe ! Il justifie même son explication en soulignant que Matthieu dit « Jacob engendra Joseph », alors que Luc dit « Héli est le père (non géniteur) de Joseph ».
Seulement, la loi du lévirat pose une condition au remariage : « que l’un d’eux mourra sans laisser de fils« . Ce qui n’est pas le cas puisque « Jacob avait engendré Joseph« . Et la démonstration s’effondre.

Mais pourquoi donner la généalogie de Joseph alors qu’il n’est pas le père de Jésus ? Les chrétiens n’ont pas pu choisir : soit Jésus est un descendant de David par Joseph et il peut prétendre au titre de Messie, le roi promis aux Juifs. Soit il n’est pas le fils Joseph, mais de Dieu et il n’est pas Messie. Jésus ne peut pas être le fils de Dieu, Dieu lui-même ET Messie (Christ en grec).

Les auteurs anciens sont de beaux parleurs mais de piètres logiciens. Dans l’Antiquité, on croit ceux qui ont un beau discours, les rhétoriciens, même si on ne le comprend pas ou qu’il n’est pas cohérent.
A la réflexion, il semble que ce soit toujours la même chose aujourd’hui.

Les frères de Jésus

Le Nouveau Testament comporte des affirmations embarrassantes pour le dogme chrétien comme le passage de la 1ère Épître de Paul aux Corinthiens qui dit : « le chef du Christ, c’est Dieu », en totale contradiction avec le dogme de la Trinité. Mais ce qui nous occupe ici, c’est un passage de l’Évangile de Matthieu (13, 55) : « Celui-ci n’est-il pas le fils du charpentier ? Et sa mère ne s’appelle-t-elle pas Marie, et ses frères, Jacques, Joseph, Simon et Jude ? Et ses sœurs ne sont-elles pas toutes parmi nous ? »

Voici qui met à mal le dogme de la virginité de Marie.

Des fils de Marie

Les Églises protestantes s’en tiennent strictement au texte : Marie a bien eu des enfants après la naissance de Jésus, ce qui ne contredit pas sa virginité à la naissance de Jésus. Ne lit-on pas, toujours dans l’Évangile de Matthieu : (1, 25) « Il (Joseph) prit chez lui son épouse, mais ne la connut pas jusqu’à ce qu’elle eût enfanté un fils, auquel il donna le nom de Jésus. »

Des cousins de Jésus

Par contre, les Églises catholique et orthodoxe restent sur leurs positions : Marie est restée vierge perpétuellement. Elle n’a donc pas pu donner naissance à d’autres enfants. Bien mieux, le 8 décembre 1854, le pape Pie IX, probablement inspiré par le Saint-Esprit, déclara Marie sans souillure, exempte du péché originelle : elle n’aurait pas été conçue comme tout être humain qui d’après le christianisme est entaché du péché originel dès sa conception. C’est le dogme de l’Immaculée Conception.

Alors, qui sont Jacques, Joseph, Simon et Jude ? De simples cousins d’après Jérôme de Stridon, dit Saint-Jérôme (347-420), le traducteur de la Bible en latin. D’après lui, c’est une coutume sémite d’appeler ses proches du nom de « frères ». Mais tous les textes du Nouveau Testament sont écrits en grec, par des Grecs qui connaissent la différence entre adelfos (le frère) et anepsios (le cousin) ! Les évangiles ne désignent jamais Jean le Baptiste comme frère de Jésus. Or ils sont parents.

L’Église catholique interprète différemment le verset 1,25 de l’Évangile de Matthieu : « Il (Joseph) prit chez lui son épouse, mais ne la connut pas jusqu’à ce qu’elle eût enfanté un fils, auquel il donna le nom de Jésus. » Pour elle, rien ne dit que Joseph connut Marie après la naissance de Jésus.

D’ailleurs, réplique le Vatican, nulle part, on ne parle des fils de Marie, simplement des frères de Jésus. Et lorsque Jésus, sur sa croix, pense à l’avenir de sa mère, il ne la confie pas à l’un de ses frères, mais à Jean, apôtre et évangéliste… Pas si vite ! Ce n’est pas ce qui est écrit dans l’Évangile… de Jean (19, 26) : « Voyant ainsi sa mère et près d’elle le disciple qu’il aimait, Jésus dit à sa mère : femme voici ton fils. Il dit ensuite au disciple : voici ta mère. » Le disciple que « Jésus aimait » n’est pas identifié, il peut être n’importe qui ! J’ai consacré un article à ce sujet.

L’Évangile de Thomas qui rapporte 114 paroles attribuées à Jésus va plus loin, il fait de Jude le jumeau de Jésus. L’évangile commence par : « Voici les paroles cachées que Jésus le Vivant a dites et qu’a écrites son jumeau, Jude Thomas« . NB : en araméen, jumeau se dit Thomas, Didyme en grec.

Des beaux-fils de Marie

Les cousins restent l’option retenue officiellement par les Églises catholique et orthodoxe. Une autre hypothèse a été émise pour sauvegarder la virginité de Marie : les frères de Jésus sont des enfants d’un premier mariage de Joseph !

Que savons-nous de Joseph ? « L’histoire de Joseph le Charpentier« , un apocryphe tardif écrit en copte fourmille de détails à son sujet. Joseph a été marié à 49 ans et a eu 6 enfants, quatre garçons, Judas (Jude), Joset (Joseph), Simon et Jacques, le plus jeune, et deux filles Lycie et Lydie. Il a 90 ans lorsque Marie, âgée de 12 ans, lui est confiée par les prêtres du temple de Jérusalem où elle officiait depuis l’âge de 3 ans. À ce moment, Jacques n’est encore qu’un bébé. Marie a 15 ans lorsqu’elle met au monde Jésus. Un rapide calcul nous informe que Joseph a 93 ans. Il meurt à l’âge de 111 ans, alors que Jésus est âgé de 18 ans.

Curieux, car dans les évangiles canoniques, Jésus a l’air d’être l’aîné. Son frère Jacques n’est pas le plus jeune de la fratrie puisque c’est lui qui aurait succédé à Jésus. Simon sera, suivant la tradition rapportée par Eusèbe, le chef de la communauté de Jérusalem en 66 lors de la révolte juive contre les Romains, remplaçant Jacques mort en 63.

De plus, Joseph se rend au temple pour « racheter » son premier fils suivant la Loi juive, d’après l’Évangile de Luc (2, 23) : « Tout garçon premier-né sera consacré au Seigneur ». Le rachat s’est soldé par le sacrifice de deux tourterelles ou deux pigeons (Luc : 2, 24)

D’autres auteurs vont plus loin… dans l’absurde : ces enfants sont ceux de Clopas, qui est le frère de Joseph d’après Eusèbe de Césarée. Clopas avait pour épouse Marie. Quelle Marie ? Certains n’hésitent pas à voir dans cette épouse, Marie, mère de Jésus qui aurait épousé Clopas, frère de Joseph, à la mort de celui-ci, selon la loi du Lévirat. Mais cette loi hébraïque qui oblige le beau-frère à épouser la veuve de son frère mort, pose une condition : ce mariage a pour but de perpétuer le nom du défunt… mort sans enfant. Ce qui n’est pas le cas, Jésus a été reconnu par Joseph au Temple de Jérusalem.

Simple coïncidence ?

A la mort d’Hérode le Grand, en -4, Judas le Galiléen (ou Judas de Gamala, ville qui n’est pas en Galilée) prend les armes pour s’opposer au recensement fiscal consécutif à la prise de pouvoir des Romains en Judée. Il se proclame « messie » et s’associe à un prêtre Sadoq, comme annoncé dans les écrits de la secte de Qumran.

Que vient faire ce personnage dans un article consacré aux frères de Jésus ? Ce sont ses fils qui nous intéressent : Flavius Josèphe nous dit que Simon et Jacques, ses fils, ont été crucifiés sur l’ordre du procurateur de Judée Tibérius Alexandre vers 45 comme agitateurs, séditieux pour Josèphe. NB : En 45, le gouverneur de la Judée porte bien le titre de procurateur, tandis que Ponce Pilate n’était que préfet de 26 à 36. C’est l’empereur Claude (41-54) qui a changé le statut de la Judée devenue province impériale.

Le professeur Robert Eisenman, directeur du département d’études religieuses de l’UCLA (Université de Californie à Los Angeles), dans son livre « Maccabees, Zadokites, Christians and Qumran »  défend la thèse que les zélotes, les esséniens et les nazaréens ne sont qu’un seul et même mouvement messianique.
De plus, il sous-entend que les familles de Jésus et de Judas de Gamala étaient probablement identiques. Il écrit : « Toute la question des liens physiques entre ces deux familles messianiques reste encore à étudier. Mais le développement parallèle des familles… devrait donner à réfléchir aux historiens ». En effet, cette famille, apparemment d’après Flavius Josèphe,  se composait de 5 fils et de 2 filles.

Luigi Cascioli dans sa monographie auto-publiée « La Fable du Christ » défend la même idée. Pour lui, Jésus est le fils de Judas de Gamala prénommé Jean et dont on ne trouve aucune trace chez Flavius Josèphe. Les chrétiens auraient substitué Jésus à Jean, c’est lui que Josèphe ou un copiste appelle l’Égyptien dans le livre XX des Antiquités Juives. Je parlerai peut-être un jour de cette théorie.

Conclusions

Les évangiles ne sont pas des livres historiques : ils ne racontent pas des faits avérés, indiscutables. Les « vérités » qui s’y trouvent sont des vérités théologiques : les fidèles doivent y croire… mais pas les autres.

Un groupe de chercheurs américains, le Jesus seminar, a essayé de déterminer (par vote) quels étaient les événements qui avaient le plus de chances d’être des faits historiques et la liste des frères de Jésus leur semblait être un bon exemple. Leur critère ? C’est trop gênant pour le dogme, ça place l’Église dans une situation inconfortable. Dans le passé, il n’y avait pas trop de problèmes, peu de personnes, sauf les clercs, lisaient la Bible. Depuis le début du XXe siècle, la situation a changé et les chercheurs n’hésitent plus à critiquer le contenu des livres.

Éthiopie , pays des religions atypiques

Cet article est inspiré du dossier paru dans « Le monde de la Bible » n° 235 de décembre 2020.

Introduction

Bien qu’entouré de pays musulmans, l’Éthiopie, pays de la corne de l’Afrique, un des « berceaux de l’humanité », ne compte qu’un tiers de musulmans. Riche de son passé, il a su garder sa propre culture religieuse.

Ses habitants se nomment eux-mêmes les Habesha, les collecteurs d’encens. Ce nom, déformé par les grecs, a donné Abyssinie, l’ancien nom du pays. Sa population sémite aurait immigré depuis le sud de la péninsule arabique (Yémen) au 1er millénaire avant notre ère.

Au IVe siècle de notre ère, la ville d’Axoum, qui donnera son nom à un Etat, devient un acteur majeur du commerce entre l’Egypte et l’Inde grâce au contrôle de la navigation dans la mer Rouge. L’encens, l’or, l’ivoire, la soie et les épices transitent pas ses ports. Non ! La Mecque n’avait pas le contrôle de la route de l’encens entre le sud de la péninsule et le monde romain. Le transport ne se faisait pas à dos de chameau, mais par la mer.

Axoum deviendra le deuxième pays chrétien après l’Arménie. Il a développé une langue originale, le guèze, dont l’alphabet comporte 182 syllabes (!), composées d’une consonne et d’une voyelle. Depuis le IVe siècle, l’Éthiopie produit de nombreuses œuvres littéraires riches et variées. Le guèze est tombé en désuétude depuis le XIXe siècle, mais il reste la langue liturgique du rite chrétien.

Texte ancien en guèze
Le judaïsme éthiopien

On ignore quand le judaïsme s’est implanté en Éthiopie. Est-ce une réaction au christianisme ou au contraire, le christianisme s’est-il développé dans les communautés juives ? La question reste posée tant leurs pratiques et leurs observances se chevauchent. Les juifs d’Éthiopie prétendaient être les descendants du roi Salomon et de la reine de Saba, qui s’appelle ici Makeda. (Elle est appelée Bilqis au Yémen). Celle-ci, enceinte lorsqu’elle quitta Salomon, donna naissance à un fils Ménélik. Ménélik rendit visite à son père et ramena… l’Arche d’alliance en Éthiopie. Elle serait toujours conservée dans une chapelle de l’église Sainte-Marie-de-Sion où seul un prêtre peut la côtoyer en certaines occasions (Voir l’article sur l’Arche). Cette légende a été adoptée tant par les juifs que par les chrétiens.

Mais depuis 1990, il n’y a plus de juifs en Éthiopie ! L’intégralité de la communauté, soit 60.000 personnes, a émigré en Israël… où les Éthiopiens ne sont pas les bienvenus. Leur reconnaissance par les rabbins israéliens a donné lieu à de débats passionnés. Elle s’est assortie de conditions : les hommes ont dû faire don d’une goutte de leur sang, euphémisme pour dire qu’ils ont dû se plier à une seconde circoncision, et les femmes ont dû se soumettre à un bain rituel. Tous ont dû adopter le judaïsme normatif. Une grande partie de la communauté a conservé ses propres rites. La communauté est dirigée par des moines célibataires, des grands prêtres régionaux et des prêtres locaux ! Pas de rabbins.

Cérémonie chrétienne où une réplique le l’Arche est promenée.
Le christianisme éthiopien

Le christianisme éthiopien est apparenté au christianisme copte, les évêques ont été nommés par le patriarche d’Alexandrie jusqu’en 1959. Aujourd’hui, l’Église éthiopienne est indépendante, autocéphale, elle se proclame « Église orthodoxe », mais n’a rien à voir avec le rite gréco-russe.
La majorité de la population est chrétienne. Les chrétiens d’Éthiopie ne reconnaissent pas les conclusions du concile de Chalcédoine de 451 (voir l’article sur la nature de Jésus) : pour eux, Jésus n’a qu’une seule nature, ses natures divine et humaine ont fusionné.

Ce n’est pas leur seule particularité. Leur Bible comporte 81 livres, contre 73 chez les catholique et 66 chez les protestants. Ils pratiquent la circoncision, ils respectent le double repos sabbatique : celui du samedi et celui du dimanche et évitent de manger les aliments interdits par la Thora.

A côté d’églises de style classique richement décorées, l’architecture de certaines églises sont remarquables et surprenantes.

Elles peuvent être juchées dans des montagnes quasi inaccessibles ou creusées dans le sol, comme à Lalibela, ville qui doit son nom à un souverain qui régna aux environs de 1200.

Les fêtes ne sont pas moins originales, comme la fête de Timkat (baptême en amharique, une des 83 langues d’Éthiopie) qui a lieu en janvier et qui dure trois jours, de grande liberté pour les jeunes dans une société traditionnelle. C’est à cette occasion que les tabot, les copies de l’Arche d’alliance sortent des églises, accompagnées de musiques et de chants. Les cortèges convergent vers un même lieu, différent suivant les régions. Le plus célèbre est le site des bassins de Gondar, où les jeunes se lancent dans l’eau. La fête ne commémore-t-elle pas le baptême de Jésus ? Mêmes les musulmans s’associent à la fête.

Remarquons les couleurs des drapeaux de la seconde photo. Ce sont celles du pays, mais ce sont aussi les couleurs affichées par les « rastas » jamaïcains chantés par Bob Marley. Dans les années 1960, l’Éthiopie était une nouvelle terre sainte (Sion, prononcé Zayen dans les chansons) pour certains Jamaïcains qui considéraient l’empereur éthiopien, Haïlé Sélassié, le négus, le roi des rois, comme un messie. Le culte des rastafari pour Haïlé Sélassié est inspiré des mots du leader nationaliste jamaïcain Marcus Garvey, qui avait déclaré en 1920 : « Regardez vers l’Afrique, où un roi noir devrait être couronné, pour le jour de délivrance ». Haïlé Sélassié est le dernier roi d’une dynastie qui prétendait descendre du roi Salomon. Il a été assassiné lors d’un coup d’Etat en 1975 au grand dam de tous les Jamaïcains qui avaient émigré en Éthiopie.

L’islam éthiopien

La tradition musulmane raconte qu’à La Mecque, les disciples de Mahomet étaient persécutés par les notables. En 615, Mahomet leur conseilla de partir pour l’Éthiopie, où ils furent accueillis par le roi chrétien Ashama. La générosité du roi pour les transfuges a été récompensée par une fatwa de Mahomet : « Laissez les Éthiopiens en paix, tant qu’ils vous laisseront en paix. » L’Éthiopie était un Dar-al-Hyyad, un pays neutre, exempt de djihad. Et effectivement, lors de l’extension de l’islam, l’Éthiopie fut épargnée. Ce qui explique qu’aujourd’hui, elle reste à majorité chrétienne.

Il y eu bien au XVIe siècle, un émir, Ahmad ibn Ibrahim, qui s’attaqua au patrimoine chrétien, mais il fut vaincu avec l’aide des Portugais. La porte était ouverte aux missionnaires chrétiens, dont les jésuites, qui furent bien vite interdits de séjour et expulsés.

Aujourd’hui, l’Arabie Saoudite finance un vaste projet de conversion à l’islam wahhabite.