L’Art et les islamistes

Retranscription d’un échange de vue sur la musique, le peinture et la danse entre une musulmane (Oum Layla : Mère de Layla) et un islamiste (Abou Jihad : Père de/du Jihad [note 1]) sur un forum de discussion salafiste.

D’après le roman de Marc Trévidic sur le printemps arabe de Tunisie : Ahlam. Marc Trévidic a été juge d’instruction à la cellule antiterroriste de Paris.

Au départ, c’est Abou Brahim qui répond

Oum : Cher frère, peux-tu m’expliquer en quoi les arts poussent à la luxure.
Abou Brahim : C’est simple, ma sœur. La musique, la danse et le chant provoquent le désir. La peinture fait de même lorsqu’elle figure des êtres humains, en particulier quand les corps et les visages sont dénudés. A quoi te sert-il de porter le niqab si ta voix, ton chant ou ta musique ont le pouvoir de provoquer le désir ? Tout ce qui peut éveiller le désir sexuel est interdit par l’islam car ces plaisirs amènent à l’adultère et à la formication.
Oum : Et si une femme danse, chante ou joue d’un instrument pour son mari ?
Abou Brahim : Dans ce cas, l’islam le permet car il est autorisé d’éveiller le désir de son époux.

Ici, Abou Jihad intervient.
J’ai beaucoup de respect pour toi Abou Brahim, mais ce que tu dis est inexact. Toute musique est interdite, avec un instrument ou par le chant. Quant à la danse, elle n’est qu’une expression obscène de la musique. Les seules exceptions sont les chants guerriers et les tambours lors des mariages.
Abou Brahim se défend : Rien dans la Coran et la sunna n’interdit une femme de charmer son mari. A lui seul, elle peut dévoiler son corps (note 2). Il est donc logique qu’elle puisse lui dévoiler ses autres charmes.
Oum : Pardonne-moi Abou Jihad, mais j’ai une petite fille de trois ans. Je lui chante des berceuses. Je ne vois pas où est le mal.
Abou Jihad : Tu l’habitues aux désirs et au superficiel. Tu devrais plutôt lui réciter des versets du livre saint.
Oum : La psalmodie du Coran est aussi une musique.
Abou Jihad : Ma sœur, comment oses-tu comparer la beauté du livre saint à de la musique ? Tu devrais lire le Coran et les hadiths sur la question. Quand tu chantes, même une berceuse pour ta fille, tu t’écoutes toi-même. Tu testes la beauté de ta voix et ton pouvoir de séduction.
Oum : Je n’en crois rien. Ne me dis pas que chanter une comptine à ma fille de trois ans est haram.
Abou Jihad : Bien sûr que si.
Oum : Cher frère, je ne voulais pas m’emporter ni te manquer de respect. Cependant, peux-tu m’expliquer, j’avoue ne pas comprendre.
Abou Jihad : Si tu chantes, ta fille aimera le chant et elle chantera à son tour. Elle ne comprendra pas que le chant est haram.

Oum : Et le dessin et la peinture ?
Abou Jihad : Sur ce point, les choses sont très simples. Il est interdit de peindre des êtres vivants. Tous ceux qui reproduisent des images humaines ou animales seront voués à la géhenne car ils font preuve d’immodestie en voulant imiter Dieu, unique créateur.
Oum : Oui, mais Allah a aussi créer les fleurs et les arbres. Pourtant, il est permis de les dessiner.
Abou Jihad : C’est toléré, sans plus, car ce sont des créatures sans âme, de moindre niveau. Dieu ne leur a pas donné la vie ni la conscience.
Oum : Pardonne-moi d’insister, Abou Jihad. Ma fille de trois ans dessine son père, sa mère, sa maison, les animaux. Tous les enfants font cela dès que tu leur donnes un crayon, parfois même avant de savoir parler. Comment une chose naturelle pourrait elle être haram ?
Abou Jihad : Le très-Haut l’a interdit et son enseignement nous a été donné par le prophète. Il y a des choses que nous ne pouvons pas comprendre mais que nous devons admettre car le Très-Haut sait mieux que nous. Tu vois, Oum Leyla, tu ne sais même pas l’essentiel. Allah nous a délivré son message pour que nous le suivions. C’est la seule raison. C’est simple et logique.
Oum : Oui.
Abou Jihad : Alors pourquoi ne veux-tu pas suivre son message ? Pour quelles raisons argumentes-tu sans fin alors que les écrits sont parfaitement clairs sur le sujet ?

Ce qu’en dit le Coran

Le Coran ne se prononce pas d’une façon claire sur les arts. Il faut interpréter des versets pour le moins obscurs pour arriver à ses fins.

Le chant et la musique

Le verset 6 de la sourate 31 sert de justificatif à l’interdiction de la musique dans la sphère privée, dans les salons de thé, dans les restaurants, dans les boutiques ou les centres commerciaux. Il faut beaucoup d’imagination.

Il en est parmi les hommes qui achètent des histoires frivoles pour détourner les autres du sentier de Dieu et pour le tourner en dérision. Ils subiront un châtiment ignominieux.

Ce verset permettait d’interdire l’achat une esclave chanteuse, racontant des « histoires frivoles« .

La musique est un art islamique
La danse

Un verset, le plus connu des femmes musulmanes, est interprété comme interdisant la danse. C’est le fameux verset 31 de la sourate 24, aussi avancé pour justifier le hijab :

« Dis aux croyantes de baisser leurs regards, de garder leur chasteté, de ne montrer de leurs atours que ce qui en paraît et qu’elles rabattent leur voile (khimar) sur leur poitrine. Qu’elles ne montrent leurs atours qu’à leurs maris, à leurs pères et beaux-pères, à leurs fils ou aux fils de leurs maris, à leurs frères, ou aux fils de leurs frères ou aux fils de leurs sœurs, ou aux femmes musulmanes ou à leurs esclaves, ou aux domestiques mâles impuissants ou aux garçons impubères qui ignorent tout des parties cachées des femmes. Et qu’elles ne frappent pas avec leurs pieds de façon que l’on sache ce qu’elles cachent sous leur parure.« 

Cette nouvelle interprétation nous permet de nous questionner sur le mot « atours« . Si en frappant des pieds on révèle ses atours, il doit s’agit des bijoux. Se voiler la tête permet de cacher ses boucles d’oreilles et rabattre le voile sur la poitrine, ne présuppose pas que celle-ci soit dénudée, mais permet de dissimuler ses colliers.

La peinture

De nouveau, rien dans le Coran n’interdit la peinture, ni même la peinture figurative, représentant des hommes ou des animaux. Ce qui est interdit, ce sont les idoles (Co. 5, 90).

« Ô croyants ! le vin, les jeux de hasard, les statues et le sort des flèches sont une abomination inventée par Satan ; abstenez-vous-en et vous serez heureux. »

Les califes omeyyades décoraient leurs palais comme les empereurs byzantins. Voir l’article : « une autre culture islamique« . Et les miniatures ottomanes et perses n’hésitent pas à représenter le prophète Mahomet.

Notes

  1. En Belgique, en pleine vague des attentats terroristes, un père a voulu prénommer son fils « Jihad ». L’Administration a refusé arguant que ce prénom hypothéquait gravement l’avenir de l’enfant.
  2. Le même verset (24, 31) du Coran (voir plus haut) étend le cercle des personnes qui peuvent voir les atours d’une femme : «  à leurs maris, à leurs pères et beaux-pères, à leurs fils ou aux fils de leurs maris, à leurs frères, ou aux fils de leurs frères ou aux fils de leurs sœurs, ou aux femmes musulmanes ou à leurs esclaves, ou aux domestiques mâles impuissants ou aux garçons impubères …« 

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