L’Histoire a retenu l’année 1054 pour acter le schisme entre l’Église catholique (Rome) et l’Église orthodoxe (Constantinople). Simple convention, car les deux Églises n’ont jamais entretenu de relations cordiales. On peut même parler de guerre froide dès la fin de l’Empire romain d’Occident.
Lente rupture entre l’Orient et l’Occident
Les Wisigoths furent le dernier peuple germain à abandonner l’arianisme en 589. La même foi était, enfin, partagée dans tout l’ancien monde romain. Mais cette unanimité était un vernis de façade qui allait bientôt craquer .
Donc, tous les évêques et patriarches, à l’est (Constantinople), comme à l’ouest (Rome) étaient fidèles au « Symbole de Nicée » qui établissait les relations entre les trois entités citées dans les évangiles : Dieu le père, le Christ (le Fils) et le Saint-Esprit. Plusieurs conciles avaient été nécessaires pour fixer la nature de ces relations : de Nicée en 325 à Constantinople en 381.
La forme suivante avait été retenue (j’ai souligné les passages importants pour le développement de mon article) :
Nous croyons en un seul Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, de toutes les choses visibles et invisibles (1). Nous croyons en un seul Seigneur, Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles, Dieu venu de Dieu, lumière issu de la lumière, vrai Dieu issu du vrai Dieu, engendré et non créé, d’une même substance que le Père et par qui tout a été fait (2); qui pour nous les hommes et pour notre salut, est descendu des cieux et s’est incarné par le Saint- Esprit dans la vierge Marie et a été fait homme. Il a été crucifié pour nous sous Ponce-Pilate, il a souffert et il a été mis au tombeau ; il est ressuscité des morts le troisième jour, conformément aux Écritures; il est monté aux cieux où il siège à la droite du Père. De là, il reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts, et son règne n’aura pas de fin.
Nous croyons en l’Esprit-Saint, qui règne et qui donne la vie (3), qui procède du Père, qui a parlé par les Prophètes, qui avec le Père et le Fils est adoré et glorifié ; nous croyons une seule Église, sainte, catholique et apostolique. Nous confessons un seul baptême pour la rémission des péchés ; nous attendons la résurrection des morts et la vie du monde à venir. Amen.
NB : Bien peu de chrétiens comprennent ce dogme. Mais l’essentiel n’est pas de comprendre, mais d’y croire, c’est ça la foi. Notons que le Père est le créateur (voir 1), mais que c’est par le Christ que tout a été fait (2) et que le saint-Esprit donne la vie (3) !
Au IXe siècle, Charlemagne demande au pape Léon III de modifier une phrase concernant le Saint-Esprit. Il veut ajouter « et du Fils » (Filioque en latin) à « qui procède du Père ». Procéder veut dire « qui provient de ». Le pape est d’accord avec cette doctrine, mais refuse de modifier le texte pour ne pas heurter le patriarche de Constantinople. Les Églises orientales s’en tiennent au texte de l’Évangile de Jean qui dit : « Quand sera venu le Consolateur que je [c’est Jésus qui parle] vous enverrai de la part du Père, l’Esprit de vérité qui provient du Père, il rendra témoignage de moi ».
Mais en 1014, le pape Benoît VIII incorpore le « Filioque » dans la liturgie romaine. Le patriarche de Constantinople crie à l’hérésie. S’en suit des discussions pendant 40 ans au terme desquelles, le légat du pape, Humbert de Moyenmoutier, envoyé à Constantinople par Léon IX, et le patriarche s’excommunient mutuellement. Dès lors, le fossé ne cessera de croître.
L’excommunication a été levée en 1964 lors de la rencontre du pape Paul VI et du patriarche Athénagoras à Jérusalem.

Le fossé grandit entre les Églises grecques (orthodoxes) et romaines (catholiques)
L’Église grecque prend le nom d’orthodoxe, soit la « doctrine droite« , car elle prétend respecter les pratiques les plus anciennes. L’Église romaine prend le nom de catholique, c’est à dire universelle.
Au XIe siècle, les différents papes affirment leur puissance et se proclament supérieurs aux évêques qui doivent leur être soumis. C’est la « réforme grégorienne » (voir l’article).
En 1870, le pape va plus loin, il se déclare infaillible, c’est à dire qu’il ne se trompe pas lorsqu’il prend une décision !
Entretemps, en 1204, les Latins vont commettre l’irréparable. Les armées de la quatrième croisade, dévient de leur route vers Jérusalem pour aider un prince byzantin, Alexis IV, à s’emparer du trône impérial. Mais les croisés estiment n’avoir pas été rémunérés correctement pour leur actions. Ils prennent la ville, la pillent et s’installent jusqu’en 1261.
Le célèbre quadrige de la place Saint-Marc de Venise provient du portail de hippodrome de Constantinople.

Quelles sont les grandes différences entre les religions orthodoxe et catholique ?
Il y a des différences minimes et des différences majeures.
Chez les orthodoxes, la prière se fait debout ou assis, les catholiques s’agenouillent. Le signe de croix des orthodoxes part du haut vers le bas, puis de droite à gauche contrairement aux catholiques qui se signent de gauche à droite.
Les églises catholiques contiennent des statues de saint(e)s. Les statues sont interdites dans les églises orthodoxes qui s’ornent d’icônes. Les temples protestants, les synagogues et les mosquées n’affichent aucune représentation humaine.


L’Église romaine est une autocratie, une dictature. Le pape en est le chef tout puissant. Il peut prendre seul les décisions, il est infaillible. Dans l’Église orthodoxe, les patriarches sont des évêques sans autorité sur les autres, sauf morale. Si une décision doit être prise, elle sera débattue en synode, la réunion des évêques. Il y a deux patriarches importants, celui de Constantinople et celui de Moscou. Les tsars russes ont créé le patriarcat de Moscou après que Constantinople soit tombée aux mains des Ottomans en 1453.
L’ajout du « Filioque » qui paraît anodin a une une conséquence majeure. La seule voie vers Dieu, c’est le Christ pour les Romains. Dans l’Église grecque, il y a deux voies distinctes, le Christ et le Saint-Esprit. Les mystiques catholiques entrent en communion avec le Christ, les orthodoxes peuvent s’unir à Dieu par le Saint-Esprit, ce qu’on peut considéré comme plus spirituel, l’attention n’est pas portée sur le corps supplicié de Jésus.
Enfin, les orthodoxes rejettent la pensée de Saint-Augustin (354-430) concernant le péché. Augustin, qui n’a aucune prédisposition particulière, a décidé que l’homme, dès sa naissance, est marqué par le sceau du péché, c’est une souillure innée. L’homme est mauvais par nature.
Il se base probablement sur l’épître aux Romains de Paul, qui lui non plus n’avait aucune autorité spéciale, n’ayant jamais connu Jésus.
Voilà pourquoi de même que par la faute d’un seul homme [Adam/Eve] le péché est entré dans le monde et par le péché, la mort, et qu’ainsi la mort atteint tous les hommes, d’ailleurs tous ont péché… (Rom. 5, 12)
Les orthodoxes, par contre, croient que l’homme est naît libre, sans tache. Il pourra choisir sa voie, la nature étant inclinée vers le bien.
Cette affirmation de Saint-Augustin est lourde de conséquences pour les catholiques.
Jésus est naît d’une femme, donc corrompue par le péché, ce qui n’est pas acceptable. Il aura fallu des centaines d’années pour s’en apercevoir. En décembre 1854, le dogme de l’Immaculée conception est proclamé par le pape Pie IX. Marie est née sans tâche, immaculée. Jésus n’aura donc pas été en contact avec le péché. Ouf.