Le mardi 8 novembre 2022, les citoyens américains sont appelés aux urnes pour les élections de mi-mandat qui renouvellent la chambre des représentants (435 députés élus pour 2 ans) et un tiers du sénat qui compte 100 sièges attribués pour 6 ans.
La chambre des représentants et le sénat forment le Congrès qui contrôle la politique du gouvernement nommé par le président élu pour 4 ans.
Ces institutions respectent bien les principes de la démocratie. Et pourtant…
L’élection présidentielle
En 2000, Georges Bush est élu président alors que son adversaire, Al Gore, avait recueilli 500.000 voix de plus ! Mieux, en 2016, Hilary Clinton perd l’élection face à Donald Trump alors qu’elle comptabilisait 3 millions de voix supplémentaires. Pourquoi ?
Le président n’est pas élu directement par les citoyens, mais par un collège de 538 « grands électeurs ». Chaque État dispose d’un certain nombre de grands électeurs en fonction de sa population. Chaque État reçoit autant de grands électeurs qu’il possède de représentants et de sénateurs au Congrès (435 + 100 + 3 représentants du District de Columbia = 538). Ainsi, la Californie avec 40 millions d’habitants a 55 grands électeurs tandis que le Wyoming en dispose de 3 (le minimum) pour une population de 600 mille habitants.
L’aberration dans l’élection vient de l’attribution des voix des grands électeurs : le candidat qui comptabilise le plus grand nombre de voix dans un État gagne les votes de TOUS les grands électeurs de cet État ! Le candidat qui gagne les élection en Californie, même d’une seule voix, se rallie 55 grands électeurs.
Seuls les États du Maine (4 grands électeurs) et du Nebraska (5) répartissent les grands électeurs suivant une base proportionnelle.
Planning des élections
Les élections aux États-Unis ont toujours lieu le mardi qui suit le premier lundi du mois de novembre, et cela depuis l’origine. Les travaux des champs étant terminés, les citoyens avaient donc le temps de se rendre en ville pour voter. C’est aussi une question de déplacement qui justifie la proclamation des résultats 5 semaines après les élections pour permettre le comptage, la résolution des litiges et le déplacement des grands électeurs ans vers la capitale (Philadelphie puis Washington) pour y déposer les résultats. L’investiture du nouveau président et l’installation du Congrès a lieu deux mois et demi après les élections, temps nécessaire au déménagement des élus… à l’époque du cheval.
L’élection des représentants
Les 435 délégués à la chambre des représentants sont élus pour 2 ans. Le système électoral ne permet que deux partis, aujourd’hui, les démocrates qui défendent un gouvernement fédéral fort et les républicains qui veulent des États indépendants du pouvoir fédéral. Les démocrates sont considérés comme progressistes tandis que les républicains sont taxés de conservateurs. Le conservatisme étant fortement lié à la religion. Lorsque Bush était président, le conseil des ministres débutait par une prière.
A l’origine, la même séparation existait, mais le nom des partis était différent : le parti des républicains démocrates s’opposait aux fédéralistes. Ils sont devenus : les démocrates, couleur bleue, symbole : l’âne et les républicains, couleur rouge, symbole : l’éléphant. Le progressiste Abraham Lincoln a donc été élu sous la bannière des républicains (démocrates).
A mi-mandat, les 435 représentants sont élus, ainsi qu’un tiers des sénateurs. Le sénat se compose de 100 membres, deux par État. Mais l’élection des représentants est jouée d’avance ! Seuls une quarantaine de sièges sur les 435 donnent lieu à un suspens. Pourquoi ?
Les électeurs d’un État sont répartis en districts, en circonscriptions. L’électeur inscrit est affecté à un district en fonction de son lieu de résidence. Les districts sont dessinés par le parti qui gouverne l’État. Le redécoupage a une durée de 10 ans. La répartition des électeurs dans les districts, influence fortement le choix des candidats.
Aux États-Unis, les électeurs ne choisissent par leur représentant, ce sont les représentants qui choisissent leurs électeurs a dit Thomas Hofeller, l’ancien directeur du redécoupage pour le comité national des Républicains.

Étudions l’exemple d’un État hypothétique dont 60% des électeurs votent démocrates et 40% républicains. Cet État, envoie 5 représentants au Congrès.

Si les districts regroupent les électeurs par parti, on aura 2 représentants républicains (rouge) et 3 démocrates (bleus). La logique est bien respectée.

Par contre, si on dilue les électeurs républicains (rouge) dans des districts à majorité démocrate (bleu), les 5 représentants seront démocrates !

Il est même possible de favoriser les républicains en leur donnant 60% des délégués alors qu’ils ne représentent que 40% des électeurs.
Conclusion
Le système électoral américain est très peu démocratique. Théoriquement, un candidat à l’élection présidentielle pourrait être élu avec seulement 23% des suffrages ! Il suffit que 50,01% des électeurs inscrits dans les 12 États les plus peuplés votent pour lui pour obtenir 281 grands électeurs. Les votes des 38 autres États n’ayant aucune importance.
Au Sénat, comme tous les États ont 2 sièges, la moitié des élus ne représentent que 16% de la population !
L’élection de mi-mandat est souvent défavorable au président en exercice, car seuls les mécontents votent. Faute d’électeurs, un district généralement démocrate peut basculer dans le camp républicain. Depuis 1830, le parti au pouvoir a systématiquement perdu des sièges au Congrès sauf dans des contextes exceptionnels : la grande dépression (1934), la crise des missiles à Cuba (1962) et les attentats du 11 novembre (élection de 2002).
En conséquence, le président a deux ans (entre son élection et celles de mi-mandat) pour réaliser son programme, après, sa politique risque d’être entravée par un Congrès à majorité hostile. Les États-Unis sont donc incapables de développer des politiques à long terme.
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