Les Templiers : mystères et fantasmes

Cet article est la suite de l’article consacré aux Templiers

Que faisaient neuf chevaliers à Jérusalem ?

Plusieurs historiens contestent l’objectif des premiers « Templiers » de protéger les pèlerins sur la route de Jérusalem. Ils doutent qu’un si petit nombre de chevaliers (9 ?) aient pu mener à bien cette mission.
Que faisaient-ils donc à Jérusalem de 1019 à 1029 ? D’après ces chercheurs, le fait qu’on leur ait donné un lieu de résidence sur le Mont du temple prouve qu’ils étaient là pour mener des fouilles dans les ruines du temple de Salomon (le premier temple détruit par les Babyloniens : voir) à la recherche de l’Arche d’alliance.
Mettons les choses au point : de nos jours et depuis plus de 50 ans, des archéologues se succèdent pour fouiller le sous-sol de Jérusalem et personne n’a encore trouvé la moindre trace du temple de Salomon. La saga de Moïse est un récit mythique et l’Arche d’alliance qui est liée à ce récit est une légende. L’arche apparaît dans le Sinaï avec Moïse et disparaît du récit biblique après avoir été placée dans le temple de Salomon. Il est probable que les Hébreux aient été accompagnés dans les batailles d’un coffre contenant la représentation de leur dieu sous forme de bétyle, comme les autres peuples de l’époque, mais ce coffre n’avait rien de magique ou de fastueux.
Notons que la cité de David, la ville des Hébreux au Xe siècle avant notre ère, se trouvait au sud du Mont du temple (l’esplanade des mosquées). C’est dans cette cité que le temple aurait dû se trouver. Le Mont du temple était l’emplacement du second temple, celui qui a été embelli par Hérode le grand et détruit par les Romains en 70 et dont on voit encore un mur de soutènement, le mur des lamentations.

Les premiers chevaliers protégeaient donc bien les pèlerins se rendant à Jérusalem (prise en 1099). Le port d’Acre a été occupé en 1104 et celui de Tripoli en 1109. A ce moment, le comté de Tripoli assurait un liaison continue entre la principauté d’Antioche et le royaume de Jérusalem. Comme les pèlerins arrivaient par bateau, ils ne se déplaçaient qu’en pays conquis. Il était donc facile à quelques chevaliers de les protéger. Les protéger de quoi ? Des ribauds et ribaudes, des malandrins et des prostituées qui avaient suivi les armées des croisés. Ce sont ces voleurs, chrétiens, qui détroussaient les pèlerins, ce sont eux que les chevaliers « affrontaient ».

Cette carte est extraite de l’Atlas historique mondial de Christian Grataloup (Les Arènes)

La malédiction des rois de France

Avant d’être brûlé sur l’île aux Juifs, le 18 mars 1314, le grand maître Jacques de Molay aurait lancé une imprécation contre le roi de France, Philippe le Bel, et contre le pape, Clément V, les citant à comparaître devant Dieu avant un an. Le chroniqueur Geoffroy de Paris qui assistait à l’exécution rapporte ses paroles : « Je vais bientôt mourir, Dieu sait que c’est à tort. Il arrivera bientôt malheur à ceux qui nous condamnent sans justice. »

Un mois plus tard, en avril, Clément V, déjà malade, mourrait. Dans la même année, en novembre, Philippe le Bel chutait de cheval lors d’une chasse au sanglier et mourait. Ses trois fils lui succédèrent Louis X (1314-1316), puis Philippe V (1316-1322) et enfin Charles IV (1322-1328). Aucun n’ayant de descendance mâle, la dynastie s’est éteinte. Elle fut remplacée par la dynastie des Valois : Philippe de Valois, cousin germain de Charles IV devint roi de France sous le nom de Philippe VI.
Cette succession fut contestée par le roi d’Angleterre qui avait épousé la fille de Philippe le Bel. S’ensuivit une guerre qui dura 116 ans et qui a vu le royaume de France perdre la majorité de ses terres.
Il est curieux de noter que la dynastie des Valois a eu la même fin que la dynastie capétienne : les trois fils de Henri II lui succédèrent sans laisser de descendance mâle. Henri IV fut appelé sur le trône et inaugura le règne de la dynastie des Bourbons.

Cette malédiction est une légende propagée par un écrivain italien du XVIe siècle qui s’inspira des récits faits par un templier italien vers 1330. L’histoire a été reprise au XXe siècle par Maurice Druon en 7 volumes de 1955 à 1960. Son oeuvre a fait l’objet de deux adaptations à la télévision, en 1972 et 2005.

Où est le trésor des Templiers ?

On n’a retrouvé aucun trésor des Templiers. Mais qu’est-ce qu’un trésor à cette époque ? Se sont surtout des archives, des titres de propriété, des pièces d’argent et des instruments de culte ou des reliquaires en or. On a bien retrouvé des trésors en numéraire en France datant de l’époque mérovingienne ou du XVIe siècle, mais rien de l’époque des Templiers.
Il est peu probable que les Templiers détenaient une grande quantité de pièces d’or ou d’argent. Ils ne thésaurisaient pas, ils dépensaient beaucoup pour leurs actions en Terre sainte. S’ils avaient thésaurisé, l’économie se serait effondrée, or, elle était florissante. Ils ne possédaient que les dépôts que des tiers avaient faits. Dépôts qui ont été restitués à leurs propriétaires, dont le roi de France.
On possède leurs titres de propriété, mais pas les comptes rendus des chapitres ni leurs archives. Certains ont prétendu que ces documents étaient enfermés dans la bibliothèque secrète du Vatican. C’est la belle excuse quand on se trouve devant un mystère. Mais Napoléon Bonaparte, lors de l’annexion du Vatican (1809), a ramené une bonne partie de la bibliothèque en France. Les historiens ont eu accès aux 1887 documents concernant les Templiers, dont les minutes de leur procès. La France a rendu les documents en 1817. Le docteur Augustin Cabanès (1862-1928) prétend dans son ouvrage « Les curiosités de l’Histoire » qu’on emballait le poisson aux Halles dans des documents séculaires venant du Vatican.

Lors de son audition par le pape Clément, le Templier Jean de Châlons déclara que la veille de l’arrestation des Templiers trois chariots recouverts de paille et contenant leur trésor avaient quitté l’enclos du Temple de Paris vers la mer où ils devaient embarquer sur dix-huit navires. Les Templiers étaient donc au courant de leur arrestation, ce qui est vraisemblable, l’ordre de l’arrestation ayant été donné un mois plus tôt. Pouvaient-ils sortir de Paris sans se faire remarquer ? Oui, l’enclos du Temple était hors des murs de Paris construits par Philippe-Auguste.
Cependant, deux détails choquent dans la déposition de Jean de Châlons. Il n’était pas à Paris, mais à Nemours, près de Troyes, il rapporte donc un fait mais sans en être le témoin visuel. De plus pourquoi dix-huit navires pour charger le contenu de trois chariots ?
Personne ne sait ce que sont devenus ces chariots. En 1946, le jardinier du château de Gisors en Normandie, domaine royal à l’époque de l’arrestation, Roger Lhomoy déclara avoir vu dans une crypte du château 30 coffres, 19 sarcophages et 13 statues. Après la publication du livre de Gérard de Sède, « Les Templiers sont parmi nous » en 1962, relatant cette affirmation, les chercheurs de trésor se sont succéder sur le site… sans succès. Les fouilles ont été si nombreuses qu’il a fallu sécuriser les assises du château en coulant du béton dans les excavations. La crypte des Templiers a été scellée… si elle a jamais existé.

Sont-ils à l’origine des cathédrales gothiques ?

La construction des premières cathédrales gothiques a commencé en 1135, à Sens et à Saint-Denis (Paris). Certains chercheurs affirment que Hugues de Payns, lorsqu’il revint en France en 1129, a rapporté de Jérusalem des documents contenant le secret des techniques de construction permettant l’envolée des édifices : l’utilisation de la croisée d’ogive et de l’arc boutant à la place des piliers. De quels documents s’agissait-il ? On n’en sait rien et qu’on ne me dise pas qu’il s’agit des plans du temple de Salomon !
Le style gothique n’est pas une révolution, mais une évolution. Il ne s’est pas manifesté spontanément après 1130. Le style évolue dans le temps : au gothique dit « primitif » au XIIe siècle déjà, succèdent en France le gothique « classique » (1190-1230 environ), puis le gothique « rayonnant » (v.1230 – v.1350) et enfin le gothique « flamboyant » à partir du XVe siècle, celui devant lequel on s’émerveille.
Aucunes des centaines de commanderies templières, avec leurs chapelles, ne sont de style gothique. Le premier élément architectural gothique de Terre sainte est le portail de la grande salle du Krak des Chevaliers en Syrie. Il est l’oeuvre des ouvriers qui accompagnaient Louis IX lors de sa croisade de 1248. Et ce château appartenait… aux Hospitaliers.

Portail gothique de la grande salle du Krak des Chevaliers.
Pourquoi parle-t-on de style gothique ?

Style gothique veut dire style barbare. Ce nom a été donnée par les artistes italiens (dont Vasari) à la Renaissance alors que le modèle architectural en vogue était celui des temples grecs et romains donc très épuré.

Les francs-maçons sont-ils les continuateurs de l’ordre du Temple ?

Au Moyen-Age, les gens de la construction se réunissaient pour se transmettre le savoir-faire. L’apprenti était coopté et devait présenter une oeuvre pour devenir compagnon puis maître. Ce modèle a été adopté en Ecosse puis en Angleterre (XVIIe siècle) par des nobles et des bourgeois qui se réunissaient en secret pour se transmettre des informations ésotériques ou politiques.
En 1688, le roi d’Angleterre Jacques II renversé par Guillaume de Nassau, prince d’Orange, se réfugie en France emmenant avec lui des régiments de fidèles écossais. Ces Écossais vont créer les premières loges maçonniques en France puis sur tout le continent.
Les loges maçonniques sont secrètes à plus d’un titre :

  • Les réunions se tiennent à huis clos.
  • Le recrutement se fait par cooptions.
  • Les maçons s’engagent par serment à ne pas révéler ce qui se passe durant les réunions, les tenues.
  • Les initiations font appel à une symbolique dont le « mystère » est révélé.

Comment les loges maçonniques détiennent-elles des secrets, des réponses aux mystères de la vie ou de l’Histoire. C’est là toute la question et c’est sur cette interrogation que vont naître une foule d’obédiences plus ou moins sérieuses. Ainsi, certaines font remonter le savoir transmis à des « supérieurs inconnus », des hommes discrets ou des êtres exceptionnels comme le raconte l’ésotériste René Guénon (1886-1951) qui les situe dans l’Agartha, une cité souterraine dans le désert de Gobi qu’aurait visitée Ossendowski, un géologue fuyant la révolution bolchevique. C’est dans cette veine qu’on doit classer la Stricte observance templière (créée en 1751) qui comprend un grade nommé « chevalier du Temple ».
En 1804, dans l’église Saint-Paul et Saint-Antoine de Paris, le docteur Bernard Raymond Fabré-Palaprat ressuscite, dans le faste, l’Ordre du Temple, rien que ça, dont il se proclame grand-maître, titre que lui aurait transmis Claude-Matthieu Radix de Chevillon, décédé en 1792. Bonaparte y a même envoyé des hussards de sa garde pour encadrer la cérémonie.
L’Ordre ne survivra pas très longtemps à son Grand-maître, mais d’autres obédiences maçonniques ont pris la relève et existent toujours.

Image copiée du site Stricte observance templière.com

Les obédiences maçonniques se rattachant aux Templiers ont produit des documents prouvant leur filiation directe, par des Grands-maîtres demeurés cachés… documents qui, bien entendu, sont sujets à caution. La vraie filiation templière est à chercher dans les ordres créés dès la dissolution des Templiers au Portugal et en Espagne.
Notons que le temps a passé et qu’aucune révélation nouvelle n’a été faite.

La Maçonnerie aujourd’hui en France

Il existe deux grandes obédiences en France : la Grande loge nationale française, catholique et élitiste, elle est reconnue par la loge-mère d’Angleterre, elle est dite régulière, et le Grand Orient de France, progressiste et non reconnu. Les deux loges se différencient par plusieurs points dont les principaux sont : les membres de la Grande loge déclarent croire en Dieu, le grand architecte de l’Univers (« in God we trust » est l’article premier de la règle, texte qui figure sur les billets de banque américains), les réunions se passent devant une Bible ouverte et il est interdit d’émettre des critiques sur la religion ou la politique.

Notons le symbole maçonnique de l’œil dans un triangle. Les trois premiers présidents des Etats-Unis étaient francs-maçons : Washington, Adams et Jefferson

Qu’est-ce que la francs-maçonnerie ? Le Grand Orient de France donnait la définition suivante : « La mission de la franc-maçonnerie est avant tout de former des hommes, de modifier peu à peu leur comportement d’individus impulsifs et égoïstes en des personnalités conscientes et ouvertes au monde… Les symboles qui parlent aux sens constituent la forme essentielle du langage maçonniqueC’est une organisation fraternelle.« 

Quels sont les secrets qu’on y apprend ? Le Grand-maître Joseph-Antoine Pont successeur de Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824), célèbre maçon, disait dans une lettre à un ami : « Comme vous sans doute, très cher frère, je croyais qu’au grade suivant je trouverais la perle promise et, comme tant d’autres, je me trouvai au terme sans avoir découvert ce bijou. »

Et plus encore !

Les Templiers auraient orchestré la fin de la monarchie française en 1792. La preuve ? Le roi Louis XVI a été symboliquement enfermé dans la tour du Temple.

Les Templiers auraient fait du commerce avec les Aztèques. Ils auraient rapporté de l’argent du Mexique. La preuve ? Le port de la Rochelle qui donne sur l’Atlantique était entouré de commanderies. Ce port n’a pas de réelle destination sauf le large de l’Atlantique. Il est trop loin de l’Angleterre desservie par Calais et de la péninsule ibérique desservie par Bordeaux. L’apport conséquent d’argent aurait enrichi l’ordre du Temple et fait dévaluer la monnaie (ce qui est faux).

Les Templiers auraient ramené de Terre sainte le Saint-Graal. La preuve ? C’est à partir de cette époque qu’on commence à en parler.
Je ne peux que reprendre ce que j’ai écrit dans les reliques de la passion.
Plus de 200 coupes se disputent le titre de Saint-Graal officiel. Une coupe conservée dans la cathédrale de León en Espagne tient aujourd’hui la corde. Pour quelle raison ? C’est une coupe en onyx serti d’or, la parure date du XIe siècle. Or, c’est au XIe siècle qu’un ambassadeur arabe a remis cette coupe au roi Ferdinand le Grand de León. Au IXe siècle, Charlemagne avait fait dresser l’inventaire des objets se trouvant dans le Saint-sépulcre et ce document administratif fait mention d’une coupe qui était gardée par deux diacres. Depuis cette coupe avait disparu, il est probable qu’elle ait été emportée lors d’un pillage, le Saint-sépulcre ayant été détruit par les musulmans en 1009, après plusieurs incendies probablement accidentels au siècle précédent. Ce qui est très intéressant, c’est le compte rendu d’un pèlerin qui avait visité le Saint-sépulcre. Il décrit le calice, qui y est exposé, comme étant une coupe en onyx.

Le seul vrai mystère des Templiers

Pourquoi le pape Clément V a-t-il refusé à deux reprises, à Poitiers et à Troyes, de débattre en public des accusations contre les Templiers ? Pourquoi, alors qu’ils avouaient cracher sur la croix, ne les a-t-il pas déclarés hérétiques ?

Les mystères du christianisme

« Dieu a envoyé sur terre son fils, Jésus, le messie annoncé par les prophètes, afin de sauver les hommes. Par son sacrifice, il les a arraché au péché originel. S’ils croient en lui, leur péchés leur sont pardonnés et une vie nouvelle les attend au Paradis après la mort. Et à la fin des temps, toute proche, ils ressusciteront comme Jésus ».

Les Grecs et les Romains se sont-ils laissés convaincre par ce message somme toute basique. Ont-ils adhéré à la nouvelle religion eux qui ignoraient ce que signifiait le mot « messie » et qui ignorait la notion de « péché originel », une invention chrétienne. Les Romains ne connaissent pas le péché, mais bien la faute. Leur peur ultime était de tomber dans l’oubli.
Même les Juifs ne se sentaient pas concernés par ce péché d’Adam et de Ève : le péché individuel avait été remplacé par un péché collectif, celui du peuple élu, que le grand prêtre « négociait » seul face à Dieu, enfermé dans le Saint du saint du temple de Jérusalem, le jour du yom kippour, le jour du grand pardon.

Les textes anciens qui nous sont parvenus, le Nouveau Testament et les apocryphes, sont peu diserts sur les adhésions à la nouvelle religion. Les épîtres de Paul parlent à des personnes déjà converties, ils ne nous sont donc d’aucune utilité sur ce sujet. Dans les Actes des Apôtres, un discours de Pierre, qui ne nous apprend rien, amène 3000 conversions. Mais ce sont surtout les miracles effectués par les apôtres qui conduisaient les Juifs à la conversion :  » La parole de Dieu croissait et le nombre de disciples augmentait considérablement à Jérusalem : une multitude de prêtres obéissait à la foi » (Actes 6, 7). Les apôtres semblent avoir eu plus de succès que Jésus, abandonné par la foule de Jérusalem.

Y avait-il un autre message ? Le christianisme primitif était-il une religion à mystères, comme il en existait tant dans l’Empire romain ?

Les cultes à mystères

Les cérémonies des cultes à mystères ne sont pas publiques. Il faut être initié, avoir suivi un cursus, pour y assister. Ce sont des « sociétés secrètes » comme la franc-maçonnerie de nos jours. Secrètes, mais nullement interdites par le pouvoir romain. Plusieurs empereurs y ont été initiés et il n’est pas rare qu’une même personne soit initiée à plusieurs cultes.

Dans l’empire romain, les cultes à mystères prolifèrent, mais on ignore comment se déroulaient les cérémonies, aucun document ne nous est parvenu, les réunions étaient secrètes. Cependant, on sait qu’ils répondaient à la triple question : « d’où venons-nous, que faisons-nous sur terre, qu’y a-t-il après« . Les cérémonies principales se tenaient au solstice d’hiver (victoire de la lumière sur les ténèbres) et à l’équinoxe du printemps (résurrection de la nature).

On peut citer parmi les principaux cultes :

  • Celui d’Isis, venant d’Egypte. Isis ressuscite son frère et époux Osiris (appelé Sérapis par les Romains).
  • Celui de Cybèle, la Grande déesse, la Mère des dieux venant de Grèce par la Phrygie (actuellement en Turquie). Elle est associée à Attis, un berger, un homme devenu dieu, il est le fils de la Mère. L’empereur Julien lui a consacré un ouvrage.
  • Celui de Dionysos, le dieu grec de la vigne, de l’ivresse et de la démesure. Il est le seul dieu mortel. Le préfixe « di » de son nom indique qu’il naquit deux fois, il a ressuscité.
  • Celui de Mithra.
Mithra

Son culte était très suivi dans l’empire. On a retrouvé plus de 200 temples de Mithra, les « mithraeum » surtout sur les frontières de l’empire et dans les villes. Retracer l’histoire de Mithra est compliqué, car il a souvent changé de fonction. Au départ, c’est un dieu du panthéon perse. Il est évincé lors de la réforme de Zarathoustra qui aurait vécu entre le XVe (15) et le VIe (6) siècle avant notre ère. On ne peut être plus précis ! N’ayant plus sa place dans le ciel perse occupé par Ahura Mazda, le dieu de la lumière qui lutte contre Ahriman, le prince des ténèbres, il est adopté par les Phrygiens avant de se passer dans l’empire romain. A la fin du IIIe siècle, il sera même assimilé à Sol Invictis, le dieu des empereurs comme Constantin.

Mithra tuant le taureau céleste

Mithra est le garant de l’ordre du monde, responsable de la bonne marche du cosmos. Son culte, non documenté, a été réinterprété à partir de l’iconographie étudiée par les historiens… qui ne sont pas tous d’accord entre eux. Il semble que les adeptes recevaient un grade en fonction de leur initiation, comme dans la franc-maçonnerie. Le sacrifice du taureau cosmique avait pour but de transférer sa force vers l’initié. On peut penser que celui-ci buvait le sang et mangeait la chair lors d’un sacrifice exceptionnel qui avait lieu une fois l’an. Dans les réunions normales, le sang et la chair du taureau étaient remplacés par l’eau (ou le vin) et le pain. Les repas communautaires sont une autre constante des cultes à mystères.

Les cérémonies se tenaient dans des endroits clos. L’assistance ne dépassait pas 50 personnes, des hommes uniquement, car les femmes étaient exclues du culte qui s’est surtout développé dans les légions.

Comme tous les cultes à mystères, le culte de Mithra a disparu sous le règne de Théodose Ier (347-395) qui promulgua un édit (391) interdisant tous les cultes autres que le catholicisme. Je reviendrai sur les circonstances de cette décision.
Dans les environs de Strasbourg, on a retrouve les ruines d’un mithraeum dont les hauts-reliefs avaient été détruits. Des pièces de monnaie provenant probablement de la bourse d’un adepte, tué lors de la destruction de temple, datent du règne de Théodore. On impute sa destruction aux fanatiques chrétiens dont la folie destructrice s’est libérée après l’édit.
A Alexandrie, à la même époque, l’évêque Théophile a fait détruire le temple de Sérapis dont la statue dominait le port.

Le christianisme un culte à mystères ?

Des indices

Le christianisme a-t-il été un culte à mystère ?
Dans l’épître aux Corinthiens, Paul dit : « je suis venu vous annoncer le mystère de Dieu » (Cor. 2, 1). Dans ce contexte, « le mystère évoque le plan de Dieu pour sauver le monde » (lexique du Nouveau Testament TOB). Ce plan était caché mais a été révélé en la personne de Jésus. Cette notion se retrouve dans quatre lettres de Paul (Corinthiens, Romains (11, 21), Éphésiens (3, 3) et Colossiens (1, 26)), mais également dans l’Évangile de Marc (4, 11) et dans deux passages des Actes des Apôtres (10, 7 et 17, 5).
Quel est ce mystère, ce plan caché ? Aujourd’hui on l’ignore. Les théologiens se gaussent de mots pour se justifier : c’est le mystère de la foi, le mystère de l’incarnation, le mystère de la résurrection. Pour définir le mot, on utilise le mot lui-même. Les « voies du Seigneur restent impénétrables ».
« Mais ce jour et cette heure, nul ne les connaît, ni les anges dans les cieux, ni le Fils, personne sinon le Père » (Mat. 24, 36). Même Jésus, pourtant promu dieu au IVe siècle, au concile de Nicée, ignore le mystère, le plan auquel il a participé. Mais ce mystère a-t-il été révélé aux premiers postulants, un peu comme les « pescher », les commentaires de la secte de Qumran qui expliquent chaque verset de la Bible dans le style : « ceci a été écrit en référence à… ». Ainsi les évangiles font parler Jésus en paraboles, paraboles qui nécessitent une explication, donc une initiation.

Quand le christianisme a été reconnu comme religion officielle au IVe siècle, la tradition a rapporté que les premiers chrétiens se réunissaient en secret « car ils étaient persécutés, leur religion étant interdite« . Ce qui est faux, j’ai consacré trois articles (1, 2, 3) à cette fable qui a la vie dure : les persécutions ont eu lieu au début du IVe siècle quand les empereurs face aux invasions ont demandé à tous les citoyens de leur assurer de leur soutien, ce que certains chrétiens ont refusé. Les persécutions étaient plus politiques que religieuses. Déjà en Perse, le roi des rois avait dû punir les chrétiens qui refusaient de cautionner ses guerres.

Ce qui est certain, c’est que le courant gnostique délivrait un enseignement aux convertis. Pour eux, ce n’est pas la foi qui sauvait, mais la connaissance.
L’Évangile de Thomas, considéré par certains comme gnostique, est un véritable cahier de cours pour les nouveaux adhérents. Il comporte presque toutes les paraboles reprises dans les évangiles canoniques. Voici les trois premiers des 114 paroles (logia).

Voici les paroles secrètes que Jésus le Vivant a dites et que Didyme Jude Thomas a écrites.

1 Et il a dit : «Celui qui trouvera les interprétations de ces paroles ne goûtera jamais la mort.»

2 Jésus a dit : «Que celui qui cherche ne cesse pas de chercher, jusqu’à ce qu’il trouve. Et, quand il aura trouvé, il sera troublé ; quand il sera troublé, il sera émerveillé, et il régnera sur le Tout.»

3 Jésus a dit : «Si ceux qui vous guident vous disent : ‘Voici, le Royaume est dans le ciel’, alors les oiseaux du ciel vous précéderont ; s’ils vous disent qu’il est dans la mer, alors les poissons vous précéderont. Mais le Royaume est à l’intérieur de vous, et il est à l’extérieur de vous. Lorsque vous vous connaîtrez, alors on vous connaîtra ; et vous saurez que c’est vous les fils du Père vivant. Si au contraire vous ne vous connaissez pas, alors vous êtes dans la pauvreté, et c’est vous la pauvreté.

L’Évangile de Thomas peut être consulté sur le site : http://www.arsitra.org/yacs/files/article/145/evangile_de_thomas.pdf

Quel enseignement ?

On ne peut qu’imaginer l’enseignement qui aurait été prodigué aux postulants chrétiens, faute de preuves ceci n’est qu’une hypothèse.
Les cultes à mystères promettaient la résurrection après la mort pour les initiés. Mais, un dieu est mal placé pour parler de la résurrection, lui qui est immortel. Donc, Dieu envoie son fils, sous forme humaine, qui va souffrir avant de ressusciter pour montrer la voie aux hommes. Mais le monde céleste et le monde des humains sont séparés par une frontière hermétique. Il faut donc se servir d’une mortelle pour faire naître le fils de Dieu dans le monde humain. Et voilà le sauveur sur terre.
Mais comment conférer aux hommes une partie du pouvoir de Dieu pour leur permettre d’atteindre le monde d’en-haut et de ressusciter ? Pour les gnostiques, l’homme créé à partir de la matière a gardé une étincelle divine, il suffit de la retrouver par la connaissance. Pour les autres chrétiens, l’homme doit puiser sa force dans le fils de Dieu, comme les adeptes de Mithra la puisaient du taureau. Ce contact avec le fils de Dieu, c’est l’eucharistie, le partage du pain et du vin.
Les évangiles racontent le dernier repas de Jésus. Ce n’est pas un repas de Pâque juive, mais un repas essénien, tel que décrit dans les manuscrits de la secte de Qumran. Mais est-ce bien ce repas que les chrétiens perpétuent aujourd’hui ? Il semble que non.

L’eucharistie (encore) de nos jours

Toutes les cérémonies chrétiennes se terminent par la communion, au cours de laquelle, les fidèles rassemblés devant le prêtre reçoivent le pain (l’hostie),… mais plus le vin, que seul l’officiant boit par mesure d’hygiène. Ce qui est important dans cette communion, c’est que le fidèle ne mange pas du pain, mais le corps du Christ. Ce sont les paroles du prêtre lorsqu’il présente l’hostie : « le corps du Christ » (corpus Christi). Le vin est son sang. Et ce n’est pas symbolique ! Pour le catholique, l’hostie et le vin deviennent réellement le corps et le sang de Jésus. C’est la transsubstantiation : le changement s’opère tout en conservant la substance du pain et du vin. Cette communion avec le Christ est essentiel pour les chrétiens comme manger le produit des sacrifices était essentiel pour les païens qui entraient en communion avec leurs dieux. Le dogme de la transsubstantiation a été défini au concile de Latran de 1215 et confirmé au concile de Trente en 1542 après que Luther ait rejeté cette interprétation.

La pire sentence pour un chrétien est donc l’excommunication, l’exclusion de la communion qui est un obstacle à la résurrection. Donc, la résurrection est bien liée à la consommation du corps et du sang du Christ.
En 390, lors d’une saute d’humeur, l’empereur Théodose Ier ordonne de massacrer les habitants de Thessalonique qu’il avait invités à assister à des jeux. L’évêque de Milan, Ambroise l’excommunia et l’obligea à venir s’humilié en 391, lors des fêtes de Pâques. Alors que Théodose résidait à Constantinople, il a dû se déplacer à Milan, l’autre capitale de l’empire ! A cette période, les évêques commandaient aux empereurs ! Notons qu’Ambroise, évêque de Milan était plus puissant que celui de Rome (le pape). Il est probable qu’en échange de sa réintégration dans la communauté chrétienne, il dut promulguer l’édit qui interdisait tous les autres cultes. Ce qui permit aux fanatiques chrétiens de détruire impunément les lieux de cultes. Mais nombre de Romains, surtout parmi l’élite résistèrent. Athènes resta majoritairement païenne jusqu’en 529, date de la fermeture de l’école platonicienne.